immeuble par destination dissertation juridique

Immeuble par destination : définition et exemple

Immeuble par destination : définition et exemple

Qu'est-ce qu'un immeuble par destination ?

Un immeuble par destination est en réalité un bien meuble, c’est-à-dire non fixé au sol. Il devient un immeuble par destination lorsque le propriétaire d’un immeuble le rattache de façon pérenne à l’immeuble et lorsqu’il est indispensable à l'exploitation de ce dernier. Supprimer l’immeuble par destination de l’immeuble reviendrait, en effet, à dénaturer le lieu en question. Cependant, pour quelle raison qualifier un bien meuble d’immeuble par destination ? On peut parler de fiction juridique dans le sens où le meuble est considéré du point de vue de la loi comme un immeuble. Il y a donc modification du statut juridique du bien. Pour mieux comprendre concrètement ce qu’est un immeuble par destination, il est possible de se reporter à l’article 524 du Code civil relatif aux biens et aux différentes modifications de la propriété, qui liste ce qui peut être jugé comme immeuble par destination. Le législateur cite notamment les animaux que le propriétaire d’un fonds y a placés aux mêmes fins (poules d’un poulailler, pigeons des colombiers…), les objets que le propriétaire d’un fonds y a placés pour le service et l’exploitation de ce fonds (ruches à miel, ustensiles aratoires, pressoirs, cuves…), ainsi que les effets mobiliers que le propriétaire a attachés au fonds à perpétuelle demeure.

Quelle différence entre un immeuble par destination et un immeuble par nature ?

Si un immeuble par destination est un bien meuble, un immeuble par nature est au contraire fixé au sol. Pour schématiser, l’immeuble par nature représente le bien principal et l’immeuble par destination le bien accessoire. À titre d’exemple, toutes les constructions ancrées au sol sont des immeubles par nature, qu’il s’agisse de canalisations, de ponts ou bien sûr de bâtiments. Par ailleurs, tout ce qui est indissociable du bien est considéré également comme immeuble par nature, soit les pierres ou le plâtre d’une maison. À noter également que les arbres intègrent aussi le régime des immeubles par nature.

Quels sont les deux types de liens qui permettent la qualification d'immeuble par destination ?

Afin qu’un bien soit qualifié d’immeuble par destination, il doit être caractérisé par un lien soit économique, soit matériel. On parlera naturellement de lien économique lorsque le bien est affecté au service ou à l’exploitation d’un fonds. Au sein d’une ferme par exemple, le tracteur comme le bétail pourront être qualifiés d’immeubles par destination. Quant au lien matériel, il concerne les biens attachés à perpétuelle demeure. Le fait de les enlever de l’immeuble par nature auquel ils sont attachés détériorerait l’ensemble de l’ouvrage. C’est donc le cas de tous les éléments d’une construction dont le détachement est possible, mais qui ont vocation à être des accessoires permanents d’un immeuble par nature : tapisserie, tableau scellé au mur…

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Droit et ville 2015/2 n° 80, la destination et l’usage de l’immeuble, éléments de l’application d’un régime juridique.

  • Par Romain Boffa

Pages 19 à 32

Article de revue

  • [1] La forme orale a été conservée.
  • [2] V. pour une analyse plus approfondie, notre thèse sur la destination de la chose, Lextenso, 2008.
  • [3] Cf. deux valeurs Aristote, l’eau et le diamant, qui ne se recoupent pas.
  • [4] P. Lebatteux, « Travaux d’amélioration et destination de l’immeuble », in La destination de l’immeuble en copropriété , Journée Henri SOULEAU, RD Imm . 1995, p. 432.
  • [5] C. urb., art. L. 122-1.
  • [6] D. Tomasin, « L’évolution de la propriété immobilière », in L’évolution contemporaine du droit des biens , 3 e Journées R. SAVATIER, PUF, 1990, p. 54.
  • [7] Cons. const., 7 déc. 2000, décis. n° 2000-436, JO 14 déc. 2000, p. 19861.
  • [8] JORF du 26 mars 2014 page 5925, texte n° 2.
  • [9] Soc., 4 mai 1956, Bull. civ . IV, n° 403.
  • [10] Soc., 16 janv. 1958, Bull. civ. IV, n° 99.
  • [11] Civ. 3 e , 14 mai 1997, Bull. civ. III, n° 100 ; RD imm. 1997, p. 495.
  • [12] L. BELFANTI, La notion de destination de l’immeuble en droit de la copropriété , thèse préc., n° 350.
  • [13] Civ. 3 e , 11 mars 1971, JCP 1971, II, 16722, concl. PAUCOT, note E.-J. GUILLOT ; Defrénois 1972, art. 30067, p. 274, note A. DUNES.

1 Quelques mots s’imposent à titre liminaire pour envisager les termes de mon intervention.

La destination et l’usage

2 La destination d’abord, qui est au centre de nos recherches. Le terme « destination », à travers le verbe « destiner », provient du latin destinare , qui signifie « fixer par le destin ». Cette dernière expression est fondamentale, en ce qu’elle laisse entrevoir l’économie générale de la notion même de destination  [2] .

3 Fixer désigne une action présente, par laquelle le sujet de droit détermine, par sa volonté, la finalité qu’il convient d’assigner à une chose donnée. Aussi la destination se distingue-t-elle de la destinée, cette force extérieure, quasi-surnaturelle, qui détermine l’état futur des êtres et échappe à la rationalité humaine. La destination est une création humaine tournée vers la réalisation d’un but.

4 Le destin que l’on fixe renvoie au produit de cette action, qui a vocation à rayonner dans le futur. Le sort juridique de la chose est déterminé par cette norme d’usage antérieurement fixée.

5 Aussi, la destination exprime un devoir-être : l’usage actuel de la chose est encadré par la destination juridique qui lui préexiste. Le preneur doit ainsi jouir de la chose selon la destination conventionnellement fixée par les parties ; le copropriétaire doit respecter la destination de l’immeuble et le vendeur doit garantir à l’acheteur l’aptitude de la chose à fournir l’usage préalablement fixé dans la convention.

6 La destination ne se confond pas avec l’usage effectif de la chose : en tant que résultat permanent à atteindre, elle exprime un devoir-être. Derrière le foisonnement de ses applications, se cache donc une cohérence : la destination se caractérise de manière récurrente par sa normativité, dans la mesure où elle conditionne l’utilisation qui peut être faite des biens. Elle constitue le référentiel vis-à-vis duquel s’ordonne l’usage de la chose.

7 C’est en cela que destination et usage diffèrent. La destination est une norme d’usage. La destination, c’est ce qui doit être, l’usage c’est ce qui est.

L’immeuble

8 Pourquoi la destination et l’usage sont-ils si déterminants en matière immobilière ? Parce que l’immeuble est le siège du mode de vie des individus et des sociétés. Il abrite des habitations, des commerces, des monuments, des écoles, des routes… Il est donc porteur de valeurs sociales et ne peut donc être pleinement soumis à la souveraineté du propriétaire.

9 Si je change la destination de cette bouteille d’eau pour en faire un objet architectural, qui va s’en soucier ? En revanche, si la Faculté de droit de Toulouse devenait demain une discothèque, il y aurait de nombreuses plaintes d’étudiants…

10 Prendre en compte la destination et l’usage de l’immeuble, c’est avoir une nouvelle conception de la propriété immobilière : ce n’est plus, comme le laisser suggérer l’article 544 du Code civil, une emprise totale de la matière. Le propriétaire doit composer avec les exigences urbanistiques, environnementales, sociales… L’immeuble n’est plus un bien abstrait, c’est un milieu où se concentrent des normes et des individus.

Eléments de l’application d’un régime juridique

11 La question qui se pose est de savoir en quoi la destination et l’usage contribuent à l’élaboration du régime juridique de l’immeuble. La question est centrale. Elle a pourtant été délaissée au moment du Code Napoléon. Dans l’idéologie libérale du Code civil, le bien est appréhendé abstraitement, universellement, comme un objet susceptible d’être échangé, d’entrer dans le commerce. Il ne se définit pas par rapport à sa valeur d’usage, c’est-à-dire à l’utilité concrète qu’il revêt, mais en référence à sa valeur d’échange  [3] . La cohorte de législations spéciales qui morcelle le droit des biens en fonction de leur destination, comme le montre par exemple le régime des baux (baux d’habitation, baux commerciaux, baux ruraux…), tend à caractériser précisément le déclin de la perspective abstraite et unitaire de la notion de bien.

12 Dans ces conditions, la destination et l’usage de l’immeuble sont des éléments déterminants pour connaître le régime juridique de l’immeuble.

Quel régime juridique ?

13 Je ne vais pas, dans le temps qui m’est imparti, envisager toutes les règles déclenchées à partir de la destination de l’immeuble. Et ce d’autant plus que mon intervention s’inscrit dans une réflexion autour du « respect de la destination et de l’usage de l’immeuble ».

14 L’idée directrice est que l’immeuble abrite un faisceau de normes à l’origine disparate. Prenons par exemple un immeuble en copropriété situé dans le centre-ville de Toulouse : cet immeuble est soumis à un plan local d’urbanisme, à un règlement de copropriété ; si en outre des appartements sont loués, le locataire est assujetti aux exigences de son bail.

  • le régime légal : le respect de la destination participe alors de l’intérêt général. La loi qui impose ou favorise le respect de telle ou telle destination, de tel ou tel usage ;
  • le régime conventionnel : dans le cadre légal, les volontés privées s’insèrent pour fixer tel ou tel usage. Le respect de la destination participe alors de l’intérêt des individus à l’acte juridique, la cause pourrait-on dire, de leur engagement.

I – Régime légal

16 Ici, c’est la loi qui entend, au nom de l’intérêt général, assurer le respect de certaines destinations ou de certains usages. Comment s’y prend-elle ?

17 De deux manières, par l’incitation et par la contrainte.

18 Il y a donc un régime incitatif et un régime coercitif.

A – Régime incitatif

19 On peut dire que la préoccupation première qui anime le législateur depuis la fin de la deuxième guerre mondiale est de développer le nombre de logements. Dans le dessein d’encourager l’individu à conférer à son bien une destination d’habitation, l’État octroie des aides diverses. Les illustrations ne manquent pas. Il ne convient pas ici d’exposer de manière exhaustive ce dispositif mais de relever les principales orientations prises en la matière.

20 Ainsi, la partie réglementaire du Code de la construction et de l’habitation comporte un Titre I qui regroupe les «  mesures tendant à favoriser la construction d’immeubles d’habitation  ». L’article R. 311-1, al. 2, relatif aux primes et prêts du Crédit Foncier de France, prévoit une série de dispositions ayant pour finalité d’encourager la construction d’immeubles à usage principal d’habitation ainsi que les travaux ayant pour objet d’accroître la surface ou la capacité des logements existants.

21 À ces aides à caractère social viennent s’associer diverses mesures fiscales tendant à encourager les particuliers à choisir une destination d’habitation pour leur immeuble. On songe notamment à tous les dispositifs d’investissement locatif (Périssol, de Robien, Duflot…).

22 Mais après la seconde guerre mondiale, le législateur n’a pas été seulement soucieux d’endiguer la pénurie de logements, en incitant le propriétaire à choisir une destination d’habitation pour son bien. Il s’est également préoccupé de la qualité de ces logements dans le but de favoriser l’amélioration de l’habitat.

23 Donnons-en un exemple : la loi, pour améliorer la qualité des immeubles, n’a de cesse d’abaisser les majorités requises s’agissant des travaux d’amélioration sur l’immeuble.

24 Avant la loi ALUR, les travaux sur les parties communes étaient en principe soumis, conformément à l’article 30 de la loi du 10 juillet 1965, à la double majorité prévue par l’article 26 (2/3 des copropriétaires), pour ne pas attenter de manière trop significative aux prérogatives des copropriétaires. Or, afin de favoriser la réalisation de certains travaux qui ne constituent pas une simple amélioration bénéfique aux copropriétaires, mais une exigence de confort que le législateur veut standardiser, l’article 25 de la loi prévoit que ces travaux (notamment d’économie d’énergie, de mise en conformité aux normes, d’installation d’une antenne collective) ne sont adoptés qu’à la majorité des voix des copropriétaires (majorité absolue). Ce phénomène est intéressant : dès lors qu’un élément d’équipement ne présente pas seulement une utilité subjective, propre à un cercle de copropriétaires donné, mais contient une valeur collective qui convient d’être diffusée dans le tissu social, il est incorporé dans le contenu légal de la destination de l’immeuble. Comme l’exprime un auteur, « l’article 25 de la loi devient un instrument dont le législateur se sert pour simplifier l’adoption de travaux d’amélioration qu’il entend privilégier, c’est-à-dire qu’il considère comme étant par nature conforme à la destination de tout immeuble en copropriété »  [4] . Sous l’impulsion du législateur, s’opère ainsi une standardisation du contenu de la destination de l’immeuble.

25 Depuis la loi ALUR, les choses ont été encore davantage facilitées : désormais, c’est la majorité simple qui opère, c’est-à-dire la majorité des voix exprimées par les copropriétaires présent ou représentées : «  a) Les travaux nécessaires à la conservation de l’immeuble ainsi qu’à la préservation de la santé et de la sécurité physique des occupants, qui incluent les travaux portant sur la stabilité de l’immeuble, le clos, le couvert ou les réseaux et les travaux permettant d’assurer la mise en conformité des logements avec les normes de salubrité, de sécurité et d’équipement définies par les dispositions prises pour l’application de l’article 1er de la loi n° 67-561 du 12 juillet 1967 relative à l’amélioration de l’habitat  ».

26 La loi se fait encore plus contraignante, lorsque le contenu de la destination n’est plus suggéré, mais imposé.

B – Régime coercitif

27 La loi impose le respect d’une certaine destination de deux manières : tantôt la destination est imposée (1), tantôt elle est contrôlée (2).

1 – La destination imposée par la loi

28 Ce sont essentiellement des considérations de planification urbaine visant à permettre un développement harmonieux du foncier au sein de la collectivité qui conduisent le législateur, par des règles d’urbanisme, à déterminer de manière autoritaire la destination des sols. L’outil technique utilisé par la puissance publique était traditionnellement constitué par les schémas directeurs et les plans d’occupation des sols. Ces deux documents ont été profondément remaniés par la loi SRU du 13 décembre 2000 : les schémas directeurs sont devenus les schémas de cohérence territoriale (SCOT). Les plans d’occupation des sols cèdent la place aux plans locaux d’urbanisme (PLU). Je ne vais pas entrer dans les détails.

29 Les schémas de cohérence territoriale déterminent les grandes options concernant l’avenir du territoire concerné en fonction de différents facteurs géographiques, économiques, démographiques, sociaux et environnementaux, en liaison avec la politique d’aménagement du territoire  [5] . Ainsi, les objectifs du SCOT de la grande agglomération toulousaine sont, principalement, de permettre l’accueil, d’ici à 2030, de 300 000 habitants supplémentaires, dans de bonnes conditions de logement et d’accès aux emplois ; de réduire de moitié le rythme de transformation des espaces agricoles et naturels en espaces urbanisés ; d’augmenter la part de la population desservie par des transports collectifs performants ; de maintenir les capacités du territoire de la Grande agglomération toulousaine à accueillir et développer ses fonctions économiques et tertiaires de rang métropolitain.

30 La fixation de la destination des sols est réalisée par les plans locaux d’urbanisme conformément aux orientations des SCOT. Ainsi, le plan délimite des zones à destinations différentes soumises à un régime juridique différencié, et peut notamment comporter l’interdiction de construire. Les plans locaux d’urbanisme peuvent réserver des emplacements pour les voies et ouvrages publics, les installations d’intérêt général et les espaces verts, ce qui empêche toute utilisation venant entraver la destination envisagée par la puissance publique.

31 Ces dispositions sont prévues par l’article L. 123-1-5 du Code de l’urbanisme. La philosophie générale de telles dispositions est d’appréhender la propriété immobilière non de manière segmentée, isolée, mais de la restituer dans un environnement plus global. Apparaît alors nettement la dimension collective de la propriété foncière, non plus repliée sur elle-même et dominée de manière hégémonique par son propriétaire, mais prise en tant que simple molécule au service d’un ensemble plus vaste dont l’harmonie est assurée par la puissance publique.

32 Ainsi, « si le propriétaire a le pouvoir de construire, de démolir, d’aménager un immeuble suivant la destination qui lui plait ce pouvoir n’est que théorique. Car la liberté d’usage de l’immeuble urbain est directement posée dans les documents d’urbanisme opposables à tous les propriétaires de biens immobiliers »  [6] .

2 – La destination contrôlée

33 La destination ou le changement d’usage ne sont pas interdits : mais le propriétaire ne peut seul y procéder, sans obtenir une autorisation.

34 La mesure emblématique est certainement l’article L. 631-7 du Code de la construction et de l’habitation : «  Dans les communes de plus de 200 000 habitants et dans les départements des Hauts-de-Seine, de la Seine-Saint-Denis et du Val-de-Marne, le changement d’usage des locaux destinés à l’habitation est soumis à autorisation préalable  ». Le but est d’endiguer la pénurie de logements. Il faut noter que cette rédaction est issue de la loi du 4 août 2008, qui procède à une décentralisation : l’autorisation n’est plus délivrée par le Préfet, mais par la commune concernée.

35 Il faut à cet égard souligner l’apport de la loi ALUR, qui ajoute au texte un dernier alinéa : «  Le fait de louer un local meublé destiné à l’habitation de manière répétée pour de courtes durées à une clientèle de passage qui n’y élit pas domicile constitue un changement d’usage au sens du présent article  ». Cette disposition tend à endiguer le développement des sites de partage de logements (type Airbnb), qui présente le risque de transformer les grandes agglomérations en repaires de touristes. Le fait de louer de manière répétée à des touristes constitue un changement de destination.

36 La loi ALUR ajoute en outre un nouvel article L. 631-7 A : «  une délibération du conseil municipal peut définir un régime d’autorisation temporaire de changement d’usage permettant à une personne physique de louer pour de courtes durées des locaux destinés à l’habitation à une clientèle de passage qui n’y élit pas domicile  ».

37 Le local à usage d’habitation bénéficiant de cette autorisation temporaire ne change pas de destination, au sens du 2° du II de l’article L. 123-1-5 du Code de l’urbanisme, de sorte qu’il n’y a pas d’atteinte au PLU.

38 Mais la loi introduit aussitôt une exception au bénéfice des locataires : lorsque le local à usage d’habitation constitue la résidence principale du loueur, au sens de l’article 2 de la loi n° 89-462 du 6 juillet 1989 tendant à améliorer les rapports locatifs et portant modification de la loi n° 86-1290 du 23 décembre 1986, l’autorisation de changement d’usage prévue à l’article L. 631-7 du présent code ou celle prévue au présent article n’est pas nécessaire pour le louer pour de courtes durées à une clientèle de passage qui n’y élit pas domicile. Il faut noter qu’il faut habiter huit mois pour être considéré comme habitant à titre principal.

39 Cette immixtion de la loi dans la détermination de la destination de la chose doit toutefois respecter les droits fondamentaux tels que protégés par la Constitution et la Convention européenne des droits de l’homme. On songe évidemment au droit de propriété, ou encore à la liberté d’entreprendre. Ainsi, la loi du 13 décembre 2000, relative à la solidarité et au renouvellement urbain (dite loi SRU), prévoyait que les plans locaux d’urbanisme pouvaient subordonner à l’autorisation du maire de la commune dans les villes de Paris, Lyon et Marseille tout changement de destination d’un local commercial ou artisanal entraînant une modification de la nature de l’activité. Ce dispositif avait pour objectif d’assurer la préservation de la diversité du commerce de quartier, et d’éviter que les reprises massives de locaux existants par de nouveaux propriétaires aboutissent à l’exercice d’une activité unique entraînant un appauvrissement du tissu commercial. Malgré ses intentions louables, le texte a été invalidé par le Conseil constitutionnel, par une décision du 7 décembre 2000 motivée en ces termes : « le souci d’assurer la sauvegarde de la diversité commerciale des quartiers répond à un objectif d’intérêt général ; (…) toutefois, en soumettant à une autorisation administrative tout changement de destination d’un local commercial ou artisanal entraînant une modification de la nature de l’activité, le législateur a apporté, en l’espèce, tant au droit de propriété qu’à la liberté d’entreprendre qui découle de l’article 4 de la Déclaration des droits de l’homme et du citoyen, une atteinte disproportionnée à l’objectif poursuivi »  [7] .

40 On en trouve une autre application à travers la censure par le Conseil constitutionnel de la loi ALUR sur l’autorisation des copropriétaires.

41 Selon la Décision n° 2014-691 du 20 mars 2014 « : considérant que le législateur, afin de lutter contre la pénurie de logements destinés à la location, a permis à l’assemblée générale des copropriétaires d’un immeuble de décider, à la majorité des voix de tous les copropriétaires, de soumettre discrétionnairement à son accord préalable, et sans préjudice des pouvoirs conférés à l’autorité administrative par les articles L. 631-7 et suivants du Code de la construction et de l’habitation, « toute demande d’autorisation de changement d’usage d’un local destiné à l’habitation faisant partie de la copropriété par un copropriétaire aux fins de le louer pour de courtes durées à une clientèle de passage » ; qu’il a ainsi, dans des conditions contraires à l’article 2 de la Déclaration de 1789, permis à l’assemblée générale des copropriétaires de porter une atteinte disproportionnée aux droits de chacun des copropriétaires »  [8] .

42 Pour autant, l’histoire n’est pas finie, dans la mesure où il faut également composer avec la destination de l’immeuble qui résulte des actes, des caractères et de la situation de l’immeuble.

43 C’est alors questionner le régime conventionnel de l’immeuble, tel que défini aux actes.

II – Régime conventionnel

44 La destination et l’usage de l’immeuble sont, dès lors qu’ils respectent le cadre légal que nous venons d’étudier, le fruit d’un accord de volontés : règlement de copropriété, bail, prêt, vente…

45 Nous allons voir que la référence à la destination contractuelle de l’immeuble crée à la fois un régime contraignant, en ce que l’utilisateur est bridé, dans l’usage de la chose, par cette destination. Mais il s’agit également d’un régime libérateur, dans la mesure où toutes les restrictions qui ne sont pas justifiées par cette destination conventionnelle devront céder : le locataire, le copropriétaire, l’emprunteur (…) recouvrent alors leur liberté.

A – Un régime contraignant

1 – pourquoi respecter la destination de l’immeuble .

46 L’idée générale est que la destination cristallise les raisons qui ont conduit tel ou tel contractant à acquérir un droit sur l’immeuble.

47 Ainsi, le copropriétaire s’engage dans la copropriété car l’immeuble présente des caractéristiques matérielles données, un usage général, qui le confortent dans son choix. Le bailleur consent à confier la jouissance de son bien au preneur car celui-ci s’engage à n’occuper que bourgeoisement les lieux ; le preneur contracte un contrat de bail, dans la mesure où le bien lui permet d’habiter les lieux conformément à ses aspirations. L’acquéreur d’un immeuble accepte de payer le prix parce que l’immeuble lui procure une certaine utilité.

48 On le voit, la perspective de la destination dévolue à la chose est un élément déterminant du consentement donné par la ou les parties, pour conclure un acte juridique donné : l’entrée en jouissance ou en propriété, ou la volonté de se séparer momentanément de la chose, sont commandées par l’usage qui en sera fait dans le futur, d’où la nécessité de le déterminer ab initio . C’est alors sur le terrain de l’exécution de l’acte juridique que la destination opère : en tant que relais de la cause au stade de l’exécution de l’acte juridique, elle exprime le maintien de l’intérêt des parties.

49 On peut pour s’en convaincre se référer à l’exposé des motifs de la loi du 10 juillet 1965 : la destination de l’immeuble y est décrite comme «  l’ensemble des conditions en vue desquelles un copropriétaire a acquis son lot, compte tenu des divers éléments, notamment de l’ensemble des clauses, des documents contractuels, des caractères physiques et de la situation de l’immeuble, ainsi que de la situation sociale des occupants  ».

50 Respecter la destination de l’immeuble, c’est assurer que les raisons pour lesquelles une partie a acquis ou concédé un droit dans l’immeuble sont maintenues.

2 – Comment assurer le respect de la destination de l’immeuble ?

51 Le respect est assuré par la contractualisation : la destination et l’usage sont fixés dans l’accord de volontés.

52 Chaque fois que l’immeuble fait l’objet d’une convention, la destination et l’usage sont des notions centrales.

53 Donnons-en quelques exemples :

54 En matière de bail  : l’article 1728 du Code civil met à la charge du preneur deux obligations principales : « user de la chose louée en bon père de famille, et suivant la destination qui lui a été donnée par le bail ». Dans l’esprit des rédacteurs du Code civil, cette disposition a pour finalité de conserver entre les mains du propriétaire le contrôle de l’usage du bien. Le franchissement de cette norme d’usage par le preneur est donc constitutif d’un abus de jouissance, sanctionné par la résiliation du contrat en vertu de l’article 1729 du Code civil. Ce respect de la destination s’inscrit donc dans la protection de l’intérêt du propriétaire, par la conservation de la valeur d’une chose dont il a vocation à récupérer la jouissance. Le sort de la chose est en quelque sorte scellé. Avec l’apparition des statuts des baux spéciaux, le respect de la destination s’est doté d’un enjeu supplémentaire, insoupçonné des rédacteurs du Code et dépassant la seule protection des intérêts du propriétaire : le bénéfice pour le preneur du régime légal découlant de la destination des lieux (ex. bail d’habitation, droit au renouvellement : donc élément central du régime juridique).

55 Il est également possible de mentionner les clauses d’habitation bourgeoise, qui enjoignent au preneur d’habiter bourgeoisement les lieux sans précision supplémentaire, et les clauses qui prévoient expressément l’exclusion de toute activité professionnelle.

56 En matière de prêt à usage (ex-commodat) : l’article 1880 du Code civil, relatif au prêt à usage, dispose que « l’emprunteur est tenu de veiller, en bon père de famille, à la garde et à la conservation de la chose prêtée. Il ne peut s’en servir qu’à l’usage déterminé par sa nature ou par la convention ». Apparaît cette connexité entre la conservation de la chose et le respect de la destination initiale. L’emprunteur voit donc ses prérogatives limitées par la destination assignée à la chose : il ne peut en user librement. La jurisprudence reprend cette exigence à propos d’un immeuble qui doit être utilisé selon l’usage prévu.

57 En matière de copropriété  : l’article 9 de la loi du 10 juillet 1965 pose la règle suivante : « chaque copropriétaire dispose des parties privatives comprises dans son lot ; il use et jouit librement des parties privatives et des parties communes sous la condition de ne porter atteinte ni aux droits des autres propriétaires, ni à la destination de l’immeuble ». La destination apparaît donc clairement dans le texte comme une limite au pouvoir d’usage, en principe libre, du copropriétaire. Signe de l’appréhension globale de l’immeuble, ce respect de la destination concerne à la fois les parties privatives et les parties communes.

58 L’évolution ultérieure de l’usage des parties privatives, à travers leur modification, est placée sous la destination de l’immeuble qui correspond, par sa réunion entre éléments objectifs et subjectifs, à la définition contemporaine de l’immeuble. Aussi le changement de destination des parties privatives est-il subordonné à sa conformité par rapport à la destination de l’immeuble. À défaut, le changement est impossible, même en présence d’un vote majoritaire de l’assemblée générale des copropriétaires. Il faut dans ce cas un vote unanime, car l’absence de compatibilité entre l’affectation projetée des parties privatives et la destination de l’immeuble s’analyse en une modification de la destination de l’immeuble dans son ensemble.

B – Un régime libérateur

59 L’idée est que la destination constitue la juste mesure des contraintes relatives à l’utilisation de l’immeuble. S’il convient de respecter la destination de l’immeuble fixée par la convention, toutes les contraintes qui ne sont pas justifiées par une telle destination doivent céder.

60 Ainsi, en matière de bail  : dès lors que l’activité en cause ne perturbe pas la destination d’habitation, le propriétaire des lieux ne peut s’opposer à son exercice. La reconnaissance jurisprudentielle du travail à domicile en atteste. On sait que le travail à domicile consiste en l’exercice d’une activité professionnelle, salariée ou non, dans un local d’habitation, sans réception d’une clientèle commerciale ou libérale. Le preneur habite bourgeoisement les lieux mais exerce en leur sein une activité professionnelle. Dans cette hypothèse, la jurisprudence considère que l’activité en cause, en ce qu’elle ne s’analyse pas en un changement non autorisé de la destination d’habitation, ne peut être interdite par le propriétaire. Ainsi, la confection de papiers à cigarettes  [9] pour le compte d’une entreprise commerciale et le tricot  [10] ne constituent pas une atteinte à la destination bourgeoise des lieux et sont donc permis. La destination fournit ainsi la limite à la contrainte d’usage pesant sur l’utilisateur. Plus récemment, la jurisprudence a estimé que l’activité d’assistante maternelle dans des lieux d’habitation ne constituait pas un manquement à la destination bourgeoise des lieux  [11] .

61 Ainsi encore en en matière de copropriété  : l’article 8 alinéa 2 de la loi de 1965 dispose que « le règlement de copropriété ne peut imposer aucune restriction aux droits des copropriétaires en dehors de celles qui seraient justifiées par la destination de l’immeuble, telle qu’elle est définie aux actes, par ses caractères ou sa situation ». Certes, l’alinéa 1 confère à ce contrat collectif compétence pour déterminer la destination des parties privatives et communes mais ce pouvoir n’opère qu’ ab initio . La destination de l’immeuble se substitue au règlement pour organiser la vie de la copropriété.

62 Dans cette perspective évolutive, de nombreuses clauses restrictives sont biffées par le juge, dès lors que les entraves édictées ne sont pas justifiées par la destination de l’immeuble. Il en va ainsi du changement de destination des parties privatives. Si aucune atteinte à la destination de l’immeuble n’est à déplorer, aucune clause contraire du règlement de copropriété, ou aucun vote majoritaire de l’assemblée ne peut venir entraver la décision du copropriétaire. Il en va de même pour l’éviction des clauses de non-concurrence. De telles clauses, insérées dans le règlement de copropriété, interdisent aux copropriétaires actuels ou à venir d’affecter leurs parties privatives à une activité commerciale donnée. Or, la jurisprudence a dégagé un « principe d’extranéité »  [12] des clauses de non-concurrence par rapport à la destination de l’immeuble  [13] . Ces clauses constituent en principe des entraves non justifiées par la destination de l’immeuble et elles doivent par conséquent être annulées. Cette solution a été étendue aux centres commerciaux, dont on aurait pu penser que l’affectation exclusivement commerciale pouvait justifier l’adoption de clauses de non-concurrence. La solution doit être approuvée. La clause de non-concurrence ne vise essentiellement qu’à protéger un copropriétaire, ou un groupe isolé de copropriétaires actuellement en place, qui exerce l’activité interdite par le règlement de copropriété. Aussi, la clause de non-concurrence n’incarne-t-elle pas la défense de l’intérêt collectif des copropriétaires ; elle est donc étrangère, en principe, à la destination de l’immeuble.

63 Il en va encore ainsi pour le droit de diviser son lot : la division d’un lot relève de la liberté du copropriétaire intéressé et le syndicat des copropriétaires ne peut s’y opposer que si cette division porte atteinte à la destination de l’immeuble. Ainsi, dès lors que la restriction n’est pas justifiée par la destination de l’immeuble, l’entrave doit être évincée et le copropriétaire recouvre sa liberté. Instrument de libération contre des statuts trop restrictifs, la destination de l’immeuble vient également protéger le copropriétaire contre les décisions excessivement contraignantes des organes de la copropriété.

64 Il en résulte en définitive un régime équilibré entre l’intérêt collectif et l’intérêt individuel. On pourrait en dire autant de manière générale dans toutes les hypothèses.

65 En définitive, la destination et l’usage de l’immeuble contribuent incontestablement à assurer une certaine harmonie au sein de l’immeuble.

Citer cet article

  • BOFFA Romain.
  • BOFFA, Romain.

https://doi.org/10.3917/dv.080.0019

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Section 2 - les immeubles par destination.

Section 2 Les immeubles par destination

117 . Catégorie des immeubles par destination. Un immeuble par destination est un meuble qui, par l'effet d'une fiction, est considéré comme un immeuble en raison de son affectation, soit intellectuelle, soit matérielle, à un véritable immeuble. Il y a là une manifestation de la force attractive de l’immeuble dont sont dépourvus les meubles à l’égard des immeubles ; il n’existe pas de « meubles par destination »  784 . Le Code civil ne donne pas de définition des immeubles par destination, se contentant d’énonciations (art. 524 C. civ.  785 ) non limitatives  786 , encore qu’il s’en évince deux catégories : les meubles affectés au service d’une exploitation (affectation intellectuelle) et les meubles attachés à perpétuelle demeure (affectation matérielle).

118 . Conditions de l’immobilisation par destination . Trois conditions . Un meuble est immobilisé par destination lorsque trois conditions sont remplies : l’ identité de propriétaire du meuble et de l’immeuble auquel il est destiné , l’ existence d’un rapport de destination , et la volonté d’établir ce rapport de destination .

119 . Conditions de l’immobilisation par destination. Identité de propriétaire du meuble et de l’immeuble auquel il est destiné (première condition) . Un meuble ne peut être immobilisé par destination que s’il appartient au propriétaire de l’immeuble auquel[...]

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Le fonds de commerce, par exemple, ne comprend jamais d’immeubles. V.  supra , n°  67 .

« Les objets que le propriétaire d’un fonds y a placés pour le service et l’exploitation de ce fonds sont immeubles par destination. Les animaux que le propriétaire d’un fonds y a placés aux mêmes fins sont soumis au régime des immeubles par destination. Ainsi, sont immeubles par destination, quand ils ont été placés par le propriétaire pour le service et l’exploitation du fonds : Les ustensiles aratoires ; Les semences données aux fermiers ou métayers ; Les ruches à miel ; Les pressoirs, chaudières, alambics, cuves et tonnes ; Les ustensiles nécessaires à l’exploitation des forges, papeteries et autres usines ; Les pailles et engrais. Sont aussi immeubles par destination tous effets mobiliers que le propriétaire a attachés au fonds à perpétuelle demeure. »

Cass. civ., 24 janv. 1912, DP 1913, 1, p. 337 : reconnaissance du caractère immobilier au matériel industriel d’une brasserie mais aussi aux « agents nécessaires de la production » au sens de l’art. 524 C. civ. tels que voitures, chevaux, harnais, qui servent aussi bien à l’entrée des matières premières qu’à la sortie des produits fabriqués, et les tonneaux, qui reçoivent les produits de la fabrication et permettent de les transporter et de les livrer à la consommation ; Cass. 3 e  civ., 5 mai 1981, Bull. civ. III, n° 89 : reconnaissance du caractère immobilier à des terres de bruyère.

Cass. 3 e  civ., 5 mars 1980, Bull. civ. III, n° 51 : « peut seul conférer à des objets mobiliers le caractère d’immeubles par destination celui qui est propriétaire à la fois des objets mobiliers et de l’immeuble au service duquel il les a placés ». C’est la raison pour laquelle l’immobilisation par destination d’un meuble prend fin par la vente dudit meuble par son propriétaire (Cass. req., 20 déc. 1875, DP 1876, 1, p. 343 : « aux termes de l’art. 524 C. civ., les immeubles par destination ne gardent ce caractère qu’aussi longtemps qu’ils continuent de rester attachés au fonds dont ils forment une dépendance, et (...) ils recouvrent leur qualité naturelle d’effets mobiliers dès l’instant où ils en sont distraits par une vente particulière et séparée »).

Les choses se présentent sous un jour différent à l’égard des meubles devenus immeubles par nature à la suite de leur incorporation. Dans ce cas, le meuble, à la suite de son incorporation, deviendra la propriété du propriétaire de l’immeuble dans lequel il a été incorporé, s’il ne l’était pas auparavant, par application de la règle de l’accession (art. 554 C. civ. : « Le propriétaire du sol qui a fait des constructions, plantations et ouvrages avec des matériaux qui ne lui appartenaient pas doit en payer la valeur estimée à la date du paiement ; il peut aussi être condamné à des dommages-intérêts, s’il y a lieu : mais le propriétaire des matériaux n’a pas le droit de les enlever »).

Art. 524 C. civ. : « Les objets que le propriétaire d’un fonds y a placés pour le service et l’exploitation de ce fonds sont immeubles par destination. (al. 1) Les animaux que le propriétaire d’un fonds y a placés aux mêmes fins sont soumis au régime des immeubles par destination. (al. 2) (...) ».

Art. 524 C. civ. : « (...) Sont aussi immeubles par destination tous effets mobiliers que le propriétaire a attachés au fonds à perpétuelle demeure ».

Cass. req., 9 déc. 1885, DP 1886, 1, p. 125 : « on ne peut étendre les dispositions de l’art. 524 C. civ. à d’autres objets mobiliers qu’à ceux qui ont été placés par le propriétaire sur son fonds comme étant absolument indispensables et affectés directement au service et à l’exploitation du fonds ; (...) d’après les constatations mêmes de l’arrêt attaqué, on ne saurait reconnaître un tel caractère, dans l’espèce, à des meubles placés dans les bâtiments appartenant à la Société pour un service d’hôtellerie et de restaurant, puisque ce genre d’exploitation ne tenait pas essentiellement à l’exploitation et au service du fonds, qui consistait dans une source d’eaux thermales et minérales ; (...) il importe peu que les différents services de l’établissement balnéaire et de l’hôtellerie aient été, soit dans leur installation matérielle, soit dans leur fonctionnement, enchevêtrés et confondus, ces conditions ne pouvant suffire pour faire de la partie de l’exploitation concernant le logement, la nourriture et le service des voyageurs un accessoire nécessaire de l’établissement thermal » ; Cass. req., 23 mars 1926, DP 1928, 1, p. 22 : « on ne peut considérer comme immeubles par destination, dans le sens des art. 524 et 525 C. civ., d’autres objets mobiliers que ceux qui ont été placés par le propriétaire sur le fonds comme étant absolument indispensables et affectés directement à l’exploitation du fonds ».

Cass. 3 e  civ., 29 oct. 1984, Bull. civ. III, n° 177 : « l'arrêt, qui constate que Mme X..., propriétaire de l'immeuble, exploitait l'hôtel, retient exactement que si l'énumération des meubles que l'art. 524 du Code civil considère comme immeubles par destination ne comprend que des objets affectés à une exploitation agricole ou industrielle, l'immobilisation s'étend aux meubles affectés à une exploitation commerciale lorsque les objets ont été placés dans l'immeuble par le propriétaire pour le service de son fonds » ; Cass. com., 31 mars 2009, Bull. civ. IV, n° 47 : « après avoir constaté que (...) la société Jesta était devenue propriétaire de l'ensemble immobilier (...) et relevé que les meubles affectés à l'exploitation commerciale de l'hôtel et placés dans cet immeuble par cette dernière lorsqu'elle en était propriétaire pour le service du fonds de commerce, l'arrêt retient exactement qu'ils constituaient des immeubles par destination en application de l'art. 524 C. civ. dont les conditions se trouvaient ainsi réunies (...) ».

V. notamment CA Lyon, 29 juill. 1848, D. 1849, 2, p. 163 : « l’art. 524 C. civ. établit, comme principe général, que tous les objets que le propriétaire d’un fonds y a placés pour le service et l’exploitation de ce fonds sont immeubles par destination ; (...) si, dans le même art., le législateur ajoute : “Ainsi sont immeubles par destination, les animaux attachés à la culture, etc.,” il ne procède là que par voie d’exemple et non par voie de limitation : ce qui n’ôte, même pour les cas non donnés en exemple, aucune partie de sa force au principe général, lorsque, d’ailleurs, ce principe y sera évidemment applicable ».

Cass. req., 23 févr. 1914, S. 1914, 1, p. 447 : le matériel (wagonnets, rails, croisements et autres) acheté par le propriétaire d’une briqueterie pour le service de cette briqueterie, à l’effet de conduire à l’usine la terre extraite d’une carrière doit être considéré comme un « instrument servant à la fabrication et à la production de ladite usine », cette affectation en faisant un accessoire et partant, un immeuble par destination.

Cass. civ., 24 janv. 1912, DP 1913, 1, p. 337 : reconnaissance du caractère immobilier au matériel industriel d’une brasserie, mais aussi aux « agents nécessaires de la production » au sens de l’art. 524 C. civ. tels que voitures, chevaux, harnais, qui servent aussi bien à l’entrée des matières premières qu’à la sortie des produits fabriqués, et les tonneaux, qui reçoivent les produits de la fabrication et permettent de les transporter et de les livrer à la consommation.

Cass. 1 re  civ., 1 er  déc. 1976, Bull. civ. I, n° 382 : « les juges du fond (...) ont constaté que le cognac produit par le domaine, destiné à être vendu, ne pouvait être considéré comme affecté spécialement à l’exploitation du domaine, cette exploitation pouvant s’exercer sans l’existence d’un stock ; (...) de ces constatations, ils ont déduit à bon droit que le stock d’eau-de-vie produit par le domaine n’était pas immobilisé par destination ».

Cass. 3 e  civ., 29 oct. 1984, Bull. civ. III, n° 177, préc. ; Cass. com., 31 mars 2009, Bull. civ. IV, n° 47, préc.

En vue de l’exercice d’une activité libérale notamment. En matière médicale, ainsi, le matériel du praticien pourrait être immobilisé par destination.

Cass. civ., 4 mai 1926, DP 1927, 1, p. 125 : « l’orgue (...) a été incorporé à l’église et (...) cette incorporation, jointe à son affectation à l’exercice du culte, lui a imprimé le caractère d’immeuble par destination ».

S’agissant des radiateurs, un arrêt rendu par la Cour de cassation, après avoir écarté l’attache à perpétuelle demeure (étant acquis que ceux-ci étaient « simplement vissés et reliés à l’installation par des dominos, et que leur enlèvement a seulement laissé sur le mur quelques traces faciles à cacher, sans fracture ni détérioration »), a refusé d’examiner l’argument suivant lequel ces appareils, quoiqu’ayant conservé leur mobilité, auraient été affectés au service et à l’exploitation du fonds, comme étant nouveau et mélangé de fait et de droit ( Cass. 3 e  civ., 7 juill. 1981, n° 80-12516 ).

La seule constatation que le meuble soit scellé dispense de la vérification qu’il ne puisse être détaché sans détérioration ( Cass. 3 e  civ., 26 févr. 1913, n° 11-27307 ), l’attache à perpétuelle demeure se manifestant par « des faits matériels d’adhérence apparente et durable » (Cass. civ., 18 oct. 1950, D. 1950, p. 773).

Il importe alors de vérifier la réalité de la fracture ou détérioration. Ainsi, ne constitue pas un immeuble par destination le radiateur vissé et relié à l’installation électrique par de simples dominos dont l’enlèvement « a seulement laissé sur le mur quelques traces faciles à cacher, sans fracture ni détérioration » ( Cass. 3 e  civ., 7 juill. 1981, n° 80-12516 ). Mais il en va différemment d’une « rampe d’escalier » et « d’éléments de cuisine » qui « ne pouvaient être démontés sans dommage » ( Cass. 3 e  civ., 9 avr. 2013, n° 11-22132 ).

Cass. 1 re  civ., 3 juin 1958, Bull. civ. I, n° 283 : « C’est dans l’exercice de leur pouvoir souverain d’appréciation que les juges d’appel, après avoir relevé à la fois l’absence des éléments matériels de scellement et d’intégration de la grille et la déclaration faite par Marcoux à Pichard, avant la signature de la vente, de sa volonté d’emporter la grille en quittant la maison, ont déduit de ces constatations, qui suffisent à justifier leur décision au regard des exigences des art. 524 et 525 du Code civil, que les demandeurs au pourvoi n’avaient pas apporté la preuve qui leur incombait de ce “que le propriétaire de la grille” eût “jamais eu l’intention de l’immobiliser” » ; Cass. 1 re  civ., 5 mars 1991, Bull. civ. III, n° 81 : « ayant relevé (...) que la bibliothèque litigieuse était un important meuble en L masquant entièrement les murs sur lesquels il était appuyé, et que ce meuble a été construit aux dimensions exactes de la pièce dont il épouse les particularités, et qu’ayant souverainement estimé que les propriétaires ont ainsi manifesté leur volonté de faire de l’agencement de cette bibliothèque un accessoire de l’immeuble auquel elle était fixée, et dont elle ne pouvait être détachée sans en altérer la substance, la cour d’appel (...) en a exactement déduit que ladite bibliothèque constituait un immeuble par destination attaché au fonds à perpétuelle demeure » ; Cass. 3 e  civ., 3 juill. 1968, Bull. civ. III, n° 316 : les juges du fond peuvent souverainement décider que le simple dépôt d’une statue sur une pierre plate n’établit pas suffisamment la volonté du propriétaire d’affecter l’objet définitivement à l’immeuble ; CA Poitiers, 23 oct. 1968, JCP 1969, II, 15857 : vases non scellés.

H.  Périnet-Marquet , « Évolution de la distinction des meubles et des immeubles depuis le Code civil », Études offertes à Jacques Béguin , p. 643 s., spéc. p. 651 : alors que « l’art. 524 envisageait (...) une destination économique par intention alors que l’art. 525 régissait plutôt une destination domestique par incorporation », « désormais, la destination domestique a rejoint la destination économique » : « tout objet que le juge peut considérer comme ayant été placé par le propriétaire sur son fonds pour l’usage et l’agrément de ce fonds, quel que soit ce type d’usage, est un immeuble par destination et cela même si les signes extérieurs de destination sont manifestement insuffisants ».

Cass. civ., 27 juin 1944, DC 1944, 1, p. 93 : « la qualité d’immeuble par destination dépend de conditions fixées par la loi et (...) la seule volonté du propriétaire, impuissante à créer arbitrairement des immeubles par destination, ne saurait non plus suffire à leur faire perdre cette qualité s’il n’y a pas eu soit séparation effective entre l’immeuble par nature et l’immeuble par destination, soit aliénation de l’un ou de l’autre ; (...) lorsqu’un matériel est immeuble par destination son affectation à une exploitation commerciale ne saurait lui faire perdre ce caractère » ; Cass. 1 re  civ., 7 avr. 1998, Bull. civ. I, n° 143 : « la seule volonté du propriétaire ne pouvait faire perdre aux machines affectées au service et à l’exploitation d’une usine leur qualité d’immeubles par destination, laquelle, en l’absence d’enlèvement effectivement réalisé, ne disparaissait qu’après la vente ». Adde Cass. 1 re  civ., 11 janv. 2005, Bull. civ. I, n° 25 : vente d’une exploitation piscicole comprenant des bâtiments et des terres et vente le même jour à un autre acheteur du matériel nécessaire à l’exploitation et les bassins piscicoles ; cette dernière vente est qualifiée par la Cour de cassation de vente de meubles, par conséquent non soumise à l’art. 1622 C. civ.

Cass. com., 18 mai 1978, Bull. civ. IV, n° 138 : pour décider du contraire, une cour d’appel devrait « rechercher si les créanciers hypothécaires avaient, en laissant procéder à la vente séparée des immeubles par nature, renoncé sans équivoque, à se prévaloir de leur droit de préférence sur les immeubles par destination vendus séparément ».

Cass. com., 31 mars 2009, Bull. civ. IV, n° 47 : « attendu (...) qu’après avoir constaté que (...) la société Jesta était devenue propriétaire de l’ensemble immobilier édifié en exécution du bail à construire, précédemment détenu par la société Noga, et relevé que les meubles affectés à l’exploitation commerciale de l’hôtel et placés dans cet immeuble par cette dernière lorsqu’elle en était propriétaire pour le service du fonds de commerce, l’arrêt retient exactement qu’ils constituaient des immeubles par destination en application de l’art. 524 C. civ. dont les conditions se trouvaient ainsi réunies (...) ».

L’assiette de l’hypothèque comprenant le terrain de l’exploitant s’étend ainsi au matériel immobilisé, même postérieurement à sa constitution (Cass. 1 re  civ., 19 mai 1906, DP 1909, 1, p. 345 : objets mobiliers placés pour le service et l’exploitation d’un immeuble à l’état d’usine), sauf renonciation des créanciers hypothécaires à ce bénéfice si les immeubles par destination ont été vendus séparément (Cass. com., 18 mai 1978, Bull. civ. IV, n° 138 : la cour d’appel a privé de base légale sa décision déboutant des créanciers hypothécaires demandant que leur soit alloué le montant de la vente de biens meubles immobilisés par destination, énumérés dans les constitutions d’hypothèques et vendus séparément du fonds immobilier auquel ils étaient affectés sans avoir recherché si les créanciers hypothécaires avaient, en laissant procéder à la vente séparée des immeubles par nature, renoncé sans équivoque à se prévaloir de leur droit de préférence sur les immeubles par destination).

Cass. req., 20 janv. 1913, S. 1920, p. 33 ; Cass. com., 14 oct. 1965, Bull. , n° 499 : « la cour d'appel constate que les propriétaires du fonds de commerce ne sont pas propriétaires de l'immeuble où est exploité ce fonds ; qu'ayant par la même estimé implicitement, comme l'avait fait expressément le jugement confirmé, que les bâtiments élevés par les occupants sur le terrain (hangars légers et démontables) n'étaient pas immeubles par nature, ayant en outre relevé que les parties elles-mêmes avaient compris dans les deux nantissements le matériel et l'outillage, la cour d'appel a pu déduire de ces constatations que les éléments litigieux du fonds de commerce n'étaient pas devenus immeubles par destination ».

Art. L. 525-8 al. 1 C. com. : « Le privilège du créancier nanti en application des dispositions du présent chapitre subsiste si le bien qui est grevé devient immeuble par destination ». Le texte, d’exception, doit être interprété strictement : d’une part, le privilège ne prend pas sur un meuble déjà immobilisé par destination et, d’autre part, le bénéfice de cet art. ne profite qu’au créancier bénéficiant d’un nantissement sur l’outillage et le matériel d’équipement, non aux créanciers titulaires d’autres sûretés mobilières ou aux créanciers chirographaires.

V., par exemple, le cas des warrants agricole (art. L. 342-1 al. 2 C. rur. et pêch. mar. : « L’emprunt peut porter sur les objets ayant, en vertu des art. 520 et 524 C. civ., le caractère d’immeubles, par nature ou par destination, à l’exception de ceux qui sont scellés au mur ») et hôtelier (art. L. 523-1 C. com. : « Tout exploitant d’hôtel peut emprunter sur le mobilier commercial, le matériel et l’outillage servant à son exploitation, même devenus immeubles par destination, tout en conservant la garde dans les locaux de l’hôtel »).

Cass. civ., 27 juin 1944, RTD civ. 1945, p. 127 : « lorsqu’un matériel est immeuble par destination, son affectation à une exploitation commerciale ne saurait lui faire perdre son caractère » ; le nantissement d’un fonds de commerce de brasserie ne peut avoir pour assiette l’outillage qui a été immobilisé par destination, peu important que la convention des parties indique que le nantissement portait sur le matériel d’exploitation.

Art. L. 112-3 CPC exéc. : « Les immeubles par destination ne peuvent être saisis indépendamment de l’immeuble, sauf pour paiement de leur prix ».

Cass. civ., 27 juin 1944, RTD civ. 1945, p. 127 : « lorsqu’un matériel est immeuble par destination, son affectation à une exploitation commerciale ne saurait lui faire perdre son caractère ».

Cass. com., 31 mars 2009, Bull. civ. IV, n° 47, préc. : « après avoir constaté que (...) la société Jesta était devenue propriétaire de l’ensemble immobilier (...) et relevé que les meubles affectés à l’exploitation commerciale de l’hôtel et placés dans cet immeuble par cette dernière lorsqu’elle en était propriétaire pour le service du fonds de commerce, l’arrêt retient exactement qu’ils constituaient des immeubles par destination en application de l’art. 524 C. civ. dont les conditions se trouvaient ainsi réunies (...) ».

Cass. req., 20 janv. 1913, S. 1920, 1, p. 33 : « les art. 8 et 9 de la loi du 17 mars 1909, en disposant que les fonds de commerce peuvent faire l’objet de nantissements, et que le matériel et l’outillage servant à l’exploitation du fonds sont susceptibles d’être compris dans le nantissement, n’ont pas modifié le caractère du contrat de gage en ce que le contrat ne peut avoir pour objet que des choses mobilières ; (...) il suit de là que le propriétaire d’un fonds de commerce, lorsqu’il est, en même temps, propriétaire de l’immeuble dans lequel il exploite le fonds, ne peut comprendre dans le contrat de nantissement le matériel qui est attaché à l’immeuble à perpétuelle demeure, et qui est ainsi devenu immeuble par destination ». Adde , dans un autre domaine, Cass. 3 e  civ., 26 juin 1991, Bull. civ. III, n° 197, préc. : « la nature, immobilière ou mobilière, d’un bien est définie par la loi, et que la convention des parties ne peut avoir d’incidence à cet égard », au sujet d’une clause de réserve de propriété ».

Il reste que l’immobilisation cesse par une séparation matérielle. V. Cass. civ.,, 27 juin 1944, RTD civ. 1945, p. 127 : « la qualité d’immeuble par destination dépend de conditions fixées par la loi et (...) la seule volonté du propriétaire, impuissante à créer arbitrairement des immeubles par destination, ne saurait non plus suffire à leur faire perdre cette qualité s’il n’y a pas eu soit séparation effective entre l’immeuble par nature et l’immeuble par destination, soit aliénation de l’un ou de l’autre ; (...) lorsqu’un matériel est immeuble par destination son affectation à une exploitation commerciale ne saurait lui faire perdre ce caractère » ; Cass. 1 re  civ., 7 avr. 1998, Bull. civ. I, n° 143 : « la seule volonté du propriétaire ne pouvait faire perdre aux machines en cause leur qualité d’immeubles par destination, laquelle, en l’absence d’enlèvement effectivement réalisé, ne disparaissait qu’après la vente ».

V. déjà en ce sens, R.  Savatier , La théorie des obligations en droit privé économique , 4 e  éd., Dalloz, 1979, n° 27. V. également, 105 e  Congrès des notaires de Lille, 2009, Propriétés incorporelles, 2 e  Commission, 2 e  proposition : « Considérant : – Que la notion d’immeuble par destination n’est plus adaptée à l’agriculture du xxi e  siècle, car elle nuit à l’unité du fonds agricole, – Que l’art. 524 C. civ. empêche l’affectation de certains biens au fonds agricole tels le cheptel mort ou vif et vide celui-ci de sa substance pour les exploitations en faire valoir direct, – Qu’il est nécessaire que le fonds agricole puisse inclure tous les éléments affectés à l’exploitation, y compris le cheptel mort ou vif, – Que cette difficulté plus particulièrement présente dans le fonds agricole concerne aussi tous les autres fonds d’entreprise en général. Le 105 e  Congrès des notaires propose : – Que l’immobilisation par destination soit légalement écartée en présence d’un fonds agricole en particulier et de tout fonds d’entreprise en général, à l’exception de celle des meubles attachés à perpétuelle demeure ».

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immeuble par destination dissertation juridique

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Droit et ville 2019/2 n° 88, la destination de l’immeuble et le droit foncier.

  • Par Nadège Reboul-Maupin

Pages 109 à 136

Article de revue

  • [1] Un renvoi à la notion de destination de l’immeuble est fait dans l’index de M. le Professeur William Dross : W. Dross, Droit des biens , Précis Domat, LGDJ, p. 437. Pour autant, la doctrine française s’est intéressée à ladite notion : V. quelques-unes des thèses sur le sujet : V. J.-P. Storck, Recherches sur le rôle de la destination des biens en droit privé , thèse Strasbourg, 1979 ; F.-X. Testu, L’influence de la destination des bens sur leur transmission successorale , thèse Nanterre, Ecole doctorale Droit et Science politique, Université Paris X Nanterre, 1983 ; J. Forestier, La vente de l’immeuble loué ou le rôle de la destination en droit privé , thèse de doctorat, Poitiers, Ecole doctorale P. Couvrat, Université de Poitiers, 1994 ; L. Boueri, La notion de destination en droit immobilier , thèse de doctorat, Toulon, Ecole doctorale Droit et Science politique, Université du Sud Toulon-Var, 1999 ; J. Séchier-Dechevrens, Essai sur la notion d’immobilisation par destination , thèse de doctorat Lyon, Ecole doctorale de droit, Université Jean Moulin, Lyon III, 2005 ; R. Boffa, La destination de la chose , préf. M.-L. Mathieu Izorche, Defrénois , 2008, Tome 32 , Lextenso .
  • [2] V. C. civ., art. 2011 C. civ. et svt ; R. Boffa, La destination de la chose , préc., n° 4.
  • [3] Loi n° 65-557 du 10 juillet 1965, art. 9.
  • [4] V. F. Pollaud-Dulian, Le droit de destination – Le sort des exemplaires en droit d’auteur , préf. A. Francon, LGDJ, coll. Bibl. dr. privé, t. 205, 1989.
  • [5] Le vocable de destination émerge dans notre langue sous la forme d’une bulle de Grégoire, à la fin du XII e  siècle : Eneas, 1130, Nouveau dictionnaire étymologique et historique , Librairie Larousse 1971, p. 231 cité par R Boffa, La destination de la chose , préc., n° 5.
  • [6] B. Mallet-Bricout, Propriété, affectation, destination. Réflexion sur les liens entre propriété, usage et finalité , RJTUM, 2014, n° 3, p. 539 citant Le Nouveau Petit Robert. Dictionnaire alphabétique et analogique de la langue française , Paris, Dictionnaire Le Robert, 2012, p. 713, v° « destination ».
  • [7] B. Mallet-Bricout, Propriété, affectation, destination. Réflexion sur les liens entre propriété, usage et finalité , préc., n° 3, p. 539.
  • [8] G. Cornu, (dir.), Vocabulaire juridique , 9 e  éd., Paris, PUF, 2011, p. 284.
  • [9] B. Mallet-Bricout, Propriété, affectation, destination. Réflexion sur les liens entre propriété, usage et finalité , préc., n° 3, p. 539.
  • [10] R. Cabrillac (dir.), Dictionnaire du vocabulaire juridique , 2014, 5 e  éd. Paris, Éditions Lexis Nexis, 2013, note 7, v° destination.
  • [11] S. Guinchard et T. Debard (dir.), Lexique des termes juridiques , 21 e  éd., Dalloz, 2014, note 9, p. 316, v° « destination ».
  • [12] Au lendemain de la Seconde Guerre mondiale, le législateur a entendu poursuivre l’objectif d’autonomie alimentaire et pour y parvenir, par l’ordonnance n° 45-2380 du 17 octobre 1945, modifiée et complétée par la loi n°46-682 du 13 avril 1946, il institua le statut de fermage : H. Bosse-Platière, F. Collard, B. Grimonprez, Th. Tauran, B. Travely, Droit rural (Entreprise agricole, Espace rural, Marché agricole) , Coll. Droit &Professionnels, Lexis Nexis, 2013, n° 126.
  • [13] V. en ce sens, Ph. Malaurie et L. Aynès, Droit civil, Les biens , Defrénois, 3 e  éd., 2007, n° 828, note 79 : remarquant que «  la destination est une notion importante du droit des biens  ».
  • [14] L. Boueri, La notion de destination en droit immobilier , préc.
  • [15] Différent en droit de l’urbanisme : La destination d’une construction relève de l’urbanisme. Elle correspond à ce pourquoi la construction a été édifiée. Elle pourrait être résumée au « contenant » de l’immeuble. Le Code de l’urbanisme en distingue désormais 5 : habitation, commerce et activités de service, exploitation agricole et forestière, équipements d’intérêts collectifs et services publics, autres activités des secteurs secondaires et tertiaires. L’usage d’un bâtiment correspond à l’utilisation d’un immeuble. Le CCH prévoit uniquement deux usages : habitation et a contrario , tout autre usage. Enfin, l’affectation ne recouvre pas de situation juridique et elle est souvent utilisée pour signifier l’usage.
  • [16] L. Boueri, La notion de destination en droit immobilier , préc.
  • [17] L. Boueri, La notion de destination en droit immobilier , préc.
  • [18] R. Boffa, La destination de la chose , préc., n° 37.
  • [19] La Cour de cassation va même jusqu’à requérir « des faits matériels d’adhérence apparente et durable » (Civ. 18 octobre 1950, D. 1950, p. 773).
  • [20] Civ. 1 ère , 7 avril 1998, Bull. civ., I, n°143 ; D. 1998, somm. comm., p. 344, obs. A. Robert ; JCP 1998, I, 171, n° 1, obs. H. Périnet-Marquet ; Defrénois 1998, P. 1173, obs. C. Atias ; CCC, 1998, n° 99, note L. Leveneur.
  • [21] Civ. 1 ère , 11 janvier 2005, n° 01-17.736 ; D. 2005, pan. 2352, obs. N. Reboul-Maupin ; Dr. Et patr., nov. 2005, p. 93, obs. J.-B. Seube.
  • [22] F. Collart-Dutilleul, Ph. Delebecque, Contrats civils et commerciaux , Précis Dalloz, 2019, 11 e  éd., n° 482.
  • [23] F. Collart-Dutilleul, Ph. Delebecque, Contrats civils et commerciaux , préc., n° 482.
  • [24] F. Collart-Dutilleul, Ph. Delebecque, Contrats civils et commerciaux , préc., n° 482.
  • [25] Civ. 3 e , 23 nov. 2017, n° 16-20805.
  • [26] R. Boffa, La destination de la chose , préc., n° 113.
  • [27] J.-R. Bouyeure et J.-D. Barbier, Le monde à part des centres commerciaux , Administrer, 2003, N° 357, p. 21, n° 5.
  • [28] R. Boffa, La destination de la chose , préc., n° 113.
  • [29] H. Bosse-Platière, F. Collard, B. Grimonprez, Th. Tauran, B. Travely, Droit rural, Entreprise agricole, Espace rural, Marché agricole , LexisNexis, Droit & professionnel, 2013, n° 146.
  • [30] Dans cette affaire, les parties avaient décidé de conclure un bail commercial d’une durée de neuf ans portant sur un ensemble immobilier devant servir « uniquement à l’élevage, et en général à toutes activités équestres à l’exclusion de l’activité de centre équestre ou de poney-club ». Six mois après, le bailleur autorisait, par avenant, l’activité de poney-club. Puis, respectant le régime applicable aux baux commerciaux, le bailleur délivrait un congé pour l’échéance des neuf ans du bail, précisant qu’il refusait le renouvellement et verserait au locataire une indemnité d’éviction. Le locataire assignait alors le bailleur en nullité du congé, soutenant, d’une part, que le bail devait être requalifié en bail rural dans la mesure où l’activité initialement prévue est une activité agricole et non commerciale et, d’autre part, que la réglementation propre au bail rural ne prévoit pas de possibilité de donner congé dans ces conditions. Il considérait alors que le congé devait être déclaré nul et que le bail devait se poursuivre. Le bailleur soutenait quant à lui qu’au jour de la délivrance du congé, l’activité d’entraînement et de sport équestre, activité par définition commerciale, était prépondérante (Civ. 3e., 6 septembre 2018, n° 16-20.092).
  • [31] C. rur., art. L.411-1.
  • [32] V. pour une certaine similitude : art. 9 de la loi du 10 juillet 1965 relatif à la copropriété des immeubles bâtis.
  • [33] R. Boffa, La destination de la chose , préc., n° 374.
  • [34] Cass. 1 ère  civ., 28 novembre 1972, n° 71-14664 ; Bull. civ., I, 264.
  • [35] V. en ce sens, E. Dockès, Essai sur la notion d’usufruit , RTD civ., 1995, p. 579.
  • [36] Cass. 3 e  civ., 10 juillet 1963, Bull. civ., III, 383 ; Cass. 3 e  civ., 4 juin 1975, n° 74-10777, Bull. civ., III, 194 : où la conclusion par l’usufruitier d’un bail commercial sur les lieux destinés à un autre usage constitue en elle-même une altération de la substance de la chose soumise à usufruit, et peut caractériser un abus de jouissance de nature à entraîner la déchéance de l’usufruit.
  • [37] C. civ., art. 618.
  • [38] R. Boffa, La destination de la chose , préc., n° 250.
  • [39] J.-L. Bergel, S. Cimamonti, J.-M. Roux et L. Tranchant, Les biens , Traité de droit civil, LGDJ, 3 e  éd., 2019, n° 332.
  • [40] J.-L. Bergel, S. Cimamonti, J.-M. Roux et L. Tranchant Les biens , préc., n° 332.
  • [41] C. civ., art. 693 et s. : «  Il n’y a destination de père de famille que lorsqu’il est prouvé que les deux fonds actuellement divisés ont appartenu au même propriétaire, et que c’est par lui que les choses ont été mises dans l’état duquel résulte la servitude  ».
  • [42] R. Boffa, La destination de la chose , préc., n° 303 citant E. Dockès, Essai sur la notion d’usufruit , préc., n °23, p. 506.
  • [43] CA Grenoble, 15 février 1961, D. 1961, p. 574 cité par R. Boffa, La destination de la chose , Defrénois, Lextenso Ed., Coll. Thèses, Tome 32, n° 303 : Ainsi, a pu être validé le fait pour l’usufruitier d’une propriété maraîchère de louer une ancienne écurie et la cour attenante pour l’exploitation d’un commerce de bois et charbons, en raison du fait que l’immeuble, rural à l’origine, était devenu urbain du fait du développement de la ville voisine
  • [44] Civ. 3 e , 2 février 2005, n° 03-19729, D. 2005, AJ, 568, obs. Y. Rouquet ; JCP 2005, I, 181, n° 6, obs. H. Périnet-Marquet ; RTD civ. 2005, p. 804, obs. T. Revet.
  • [45] W. Dross, Droit des biens , préc., n° 390.
  • [46] C’est le cas de son adaptation aux progrès techniques : Cass. civ. 3 e , 22 mars 2011, n° 09-70533 ; D. 2011, p. 2306, obs. N. Reboul-Maupin ; V. plus récemment, Cass. civ. 3 e , 13 décembre 2018, n° 17-24.685 : à propos de l’adaptation d’une servitude aux usages de la vie moderne est conforme ( en l’espèce, adaptation d’une servitude de passage grevant une propriété depuis 1851 (aux seuls transports de vins et bois) à l’évolution de la société).
  • [47] Il s’agit de l’intensification de l’usage du fonds : La Cour de cassation a posé en principe qu’« une servitude de passage, accessoire au fonds au profit duquel elle a été instituée, peut être utilisée pour tous les besoins de celui-ci, alors même qu’ils auraient reçu plus d’extension » (Cass. 1 ère . Civ., 4 juillet 1962, Bull. civ., I, n° 343).
  • [48] La Cour de cassation juge de longue date, à propos de son usage, qu’une servitude de passage, accessoire au fonds au profit duquel elle a été constituée par un contrat, peut être utilisée en principe pour tous les besoins de ce fonds, même transformé ou affecté à une destination nouvelle : Cass. civ. 30 avril 1929, S. 1929 I p. 296. Plus récemment, Cass. 3 e  civ., 17 novembre 2016, n° 17-11.204 : par acte du 21 mars 1875, une servitude de passage est constituée pour faciliter l’exploitation d’une parcelle de vigne. L’acte précise que « pour le cas où les acquéreurs construiraient attenant le chemin, ils auraient également le droit sans payer aucune espèce d’indemnité, d’y pratiquer les jours et ouvertures qui leur conviendraient et d’y faire déverser les eaux pluviales et ménagères ». Près d’un siècle et demi plus tard, les propriétaires actuels du fonds servant réclament l’extinction de la servitude en raison de son changement de destination, l’exploitation des vignes ayant cessé. La cour d’appel rejette leur demande. L’acte constitutif ne subordonne pas la servitude à une condition d’exercice particulière. Il prévoit d’ailleurs l’usage et les conditions de la servitude en cas de construction d’un immeuble. La servitude de passage est toujours utilisée pour la desserte des parcelles, notamment en voiture, où se trouvent une maison et un jardin. Rien n’empêche cet usage. La servitude ne peut donc être éteinte malgré le changement de destination consécutif à la cessation de l’exploitation des vignes en vue de laquelle elle a été consentie. La Cour de cassation confirme cette solution.
  • [49] W. Dross, Droit des biens , préc., n° 390.
  • [50] W. Dross, Droit des biens , préc., n° 391.
  • [51] R. Boffa, La destination de la chose , préc., spéc., p. 26 cité par G. Leray, L’immeuble et la protection de la nature , LGDJ, Bibl. Dr. urb. et de l’environnement, préf. F.-G. Trébulle, t. 15, n° 280 citant S. Vanuxem qui « explore dans sa thèse la notion de substance et utilise la chose usufruitée pour y parvenir. C’est qu’en effet, seul l’article 578, en obligeant l’usufruitier à conserver la substance de la chose ne peut s’entendre de sa seule matière. La substance signifie aussi la destination de la chose et donc, protéger la chose, ce serait conserver sa matière, mais aussi la destination à laquelle il est affectée ».
  • [52] V. pour cette proposition de substitution : S. Vanuxem, Les choses saisies par la propriété. De la chose-objet aux choses-milieux », RIEJ, 2010/1, vol. 64, p. 123 à 182, spéc., p. 133.
  • [53] S. Vanuxem, Les choses saisies par la propriété. De la chose-objet aux choses-milieux », préc., p. 123 à 182, spéc., p. 144.
  • [54] V. pour cette proposition de l’immeuble, « une chose utile » : S. Vanuxem, Les choses saisies par la propriété. De la chose-objet aux choses-milieux », préc., p. 123 à 182, spéc., p. 132.
  • [55] Article 1 Déclaration des droits de l’arbre (19/04/2019, Ass. Nat. Colloque) : « L’arbre est un être vivant fixe qui, dans des proportions comparables, occupe deux milieux distincts, l’atmosphère et le sol. Dans le sol se développent les racines, qui captent l’eau et les minéraux. Dans l’atmosphère croît le houppier, qui capte le dioxyde de carbone et l’énergie solaire. De par cette situation, l’arbre joue un rôle fondamental dans l’équilibre écologique de la planète » .
  • [56] B. Grimonprez, Nouvelle utopie foncière : pour une autre régulation de la maîtrise du foncier , Rev. Dr. rur., avril 2017, n° 11.
  • [57] B. Grimonprez, Nouvelle utopie foncière : pour une autre régulation de la maîtrise du foncier , préc., n°2 ; B. Gripmonprez, L’arable du futur : lettre au législateur de la loi sur la terre , Rev. Dr. rur., Lexis, mars 2019, dossier 16.
  • [58] Cass. soc., 19 avril 1947, D. 1948, p. 1, note R. Savatier ; V. P. Voirin, La jouissance d’une exploitation comme critère du bail à ferme et comme principe son autonomie , RTD civ. 1930, p. 230.
  • [59] R. Boffa, La destination de la chose , préc., n° 506.
  • [60] R. Boffa, La destination de la chose , préc., n° 508.
  • [61] Cass. 1 ère  civ., 31 oct. 1989, D. 1990, p. 359, note J. Maury ; RTD civ. 1990, p. 694, obs. J. Patarin.
  • [62] R. Boffa, La destination de la chose , préc., n° 305-1.
  • [63] La Cour de cassation (Cass. 1 ère  civ., 31 oct. 1989, préc.), censurant, la décision des juges d’appel au visa de l’article 860 alinéa 1 er  du Code civil prévoit qu’«  en cas de changement dans la destination depuis la date de la donation, il ne peut être tenu compte de ce changement que s’il résulte d’une cause fortuite ou étrangère à l’industrie du gratifié  ». Or, en l’espèce, «  le changement de destination des parcelles étaient dû à l’initiative du donataire et il ne pouvait donc en être tenu compte  ».
  • [64] Cass. 1 ère  civ., 11 mai 1977, Bull. civ., I, n° 225 ; JCP 1978, II, 18927, note M. Dagot.
  • [65] R. Boffa, La destination de la chose , préc., n° 305-1.
  • [66] Cass. 3 e  civ. 18 avril 2019, n° 18-11.414 ; D. 2019, p. 890.
  • [67] B. Grimonprez, Nouvelle utopie foncière : pour une autre régulation de la maîtrise du foncier , préc., n° 4.
  • [68] B. Grimonprez, Nouvelle utopie foncière : pour une autre régulation de la maîtrise du foncier , préc., n° 20.
  • [69] B. Grimonprez, Nouvelle utopie foncière : pour une autre régulation de la maîtrise du foncier , préc., n° 21. 
  • [70] B. Grimonprez, Nouvelle utopie foncière : pour une autre régulation de la maîtrise du foncier , préc., n° 25. 
  • [71] B. Grimonprez, La terre, un bien hors du commun, in La réforme du droit foncier rural : demander l’impossible , LexisNexis, 2018.

1 Destination en droit des biens. Quelle est la place de la destination dans notre droit commun des biens ? Curieusement, tandis que la destination est une interrogation philosophique et sociologique qui apparaît fondamentale, la question en droit civil ne semble guère abordée dans les ouvrages généraux de droit des biens  [1] . Toutefois, il est possible de se rassurer très vite en ouvrant un Code civil. Outre l’hypothèse la plus connue de l’immobilisation par destination (C. civ., art. 524 et 525 : on pourrait parler « de destination de l’immeuble à l’envers »), ou encore des servitudes en général et celles par destination de père de famille en particulier (C. civ., art. 693), les renvois à la notion demeurent multiples : ce sont, par exemple, le droit au bail avec l’obligation pour le locataire et le bailleur d’user de la chose raisonnablement en respectant la destination des lieux loués (C. civ., art. 1728), ou encore l’indivision, par l’obligation faite aux indivisaires d’user et jouir des biens indivis conformément à leur destination, dans la mesure compatible avec le droit des autres (C. civ., 815-9). On peut même voir dans l’introduction de la fiducie par la loi n° 2007-211 du 19 février 2007 dans le Code civil « la consécration d’une propriété finalisée, instrumentalisée : la maîtrise de la chose passe par le respect d’une destination préexistante »  [2] . Enfin, d’une manière implicite, force est de la retrouver au sein de l’usufruit quand il s’agit pour l’usufruitier d’en conserver la substance. N’y-a-t-il pas là un certain clin d’œil à la destination du bien, c’est-à-dire à l’usage qui en est fait ? Ou bien, enfin, pour la caractérisation des troubles anormaux de voisinage qui est appréciée par les juges du fond eu égard à la destination que la victime du trouble donne à son immeuble. D’ailleurs, si la destination de l’immeuble apparaît encore de façon clairsemée en droit civil des biens, elle est une notion capitale du statut de la copropriété en ce qu’elle établit sa dimension collective  [3] , ou encore en droit de la propriété intellectuelle, avec le droit de la destination dont est investi l’auteur sur le sort de ses exemplaires  [4] .

2 Définition du vocable de destination. Après ce rapide tour d’horizon de la présence de la destination en droit civil des biens, il faut en venir désormais au vocable même de destination. Étymologiquement, la destination viendrait du latin médiéval destinatio (XII e  s)  [5] , qui « renverrait d’une part à la finalité « ce pour quoi une personne ou une chose est faite », et d’autre part à l’affectation au sens « d’emploi, d’usage et d’utilisation » »  [6] . « Dans le langage courant, les deux termes semblent donc pour une large part se confondre »  [7] , en ce qu’ils renvoient à un usage particulier conféré à une chose ou à une personne. Le langage juridique, quant à lui, vient nous apporter quelques précisions sur cette notion de destination. Le Vocabulaire juridique publié par l’Association Henri Capitant  [8] établit que la destination peut renvoyer « au but poursuivi » dans un acte juridique : il s’agit « de la finalité imprimée à un accord tout comme elle peut correspondre, plus concrètement, à un usage auquel une chose est affectée. Il en résulterait une destination concrète, qui renverrait à l’usage et, une définition plus abstraite, qui renverrait à la finalité »  [9] . M. le Professeur Cabrillac, quant à lui, définit la destination comme l’utilisation d’un bien à un usage particulier qui permet de déterminer sa nature juridique  [10] . D’autres  [11] avancent encore « la norme d’usage d’une chose déclenchant le régime juridique approprié ». Ce qui revient à considérer, selon ces ouvrages, que la destination commanderait à la fois la nature ou le régime juridique des biens. Qu’en est-il en droit foncier ?

3 Destination de l’immeuble et droit foncier. La notion de bien foncier est très voisine de celle de bien immobilier sans se confondre avec elle. Dans le langage de la promotion immobilière, le foncier va désigner le fonds de terre, à savoir le terrain qui sert de support à une construction immobilière. Il reste que l’adjectif foncier renvoie, dans l’usage courant, à un bien relatif à la propriété non bâtie mais aussi à la propriété bâtie. Le droit foncier, quant à lui, c’est plus précisément l’étude de l’ensemble des règles qui régissent la gestion des terres et, de façon générale des terres urbaines ou rurales. Il existe deux catégories de droit foncier, à savoir le droit immobilier urbain et le droit foncier rural. C’est sous cette double acception qu’il nous faudra envisager la destination de l’immeuble. Le droit au bail en témoigne puisqu’il peut s’agir d’un immeuble rural ou urbain mais toujours considéré en fonction de sa destination. L’immeuble rural s’est distingué par l’institution d’un statut de fermage largement d’ordre public  [12] et, peu après, la loi du 1 er  septembre 1948 imposait un statut d’ordre public au bail d’un immeuble d’habitation, avant qu’un décret du 30 septembre 1953 ne réalise la même chose pour le bail d’un immeuble commercial. Il reste que, non défini en droit foncier, la destination de l’immeuble est une « notion importante »  [13] qui nécessite de savoir en amont de quoi l’on parle. C’est pourquoi, il paraît opportun de présenter la notion de destination de l’immeuble à partir de ses sources et de ses applications variées en droit foncier tout en précisant qu’elle est un instrument essentiel de ce dernier. Ce qui va nous permettre de préciser qu’en prolongement de la notion (I), existent des fonctions (II).

I. La notion de destination de l’immeuble en droit foncier

4 Notion. La destination est une notion « charnière » en droit foncier. Elle est « le fil directeur permettant aux praticiens de l’immobilier de dégager, parmi les grandes catégories de règles existantes, celles dont ils doivent faire application. Elle est, à ce titre, une notion fonctionnelle »  [14] dont il convient d’abord d’envisager ses sources (A) avant d’en relater ses diverses applications au sein du droit foncier (B).

A. Les sources de la destination de l’immeuble en droit foncier

5 La destination de l’immeuble, non défini en droit foncier  [15] , est une notion qui présente un caractère composite mêlant le subjectif et l’objectif.

6 Destination subjective et objective : vision duale. D’une part, la destination revêt un « caractère subjectif car c’est ici « la volonté des parties qui va déterminer dès le départ la finalité du bien immobilier et du droit applicable. Elle représente un élément substantiel du contrat immobilier »  [16] , celui sans quoi les parties contractantes n’auraient, par exemple, ni acheté, ni loué.

7 D’autre part, la destination de l’immeuble peut revêtir « un caractère objectif en ce sens que son intervention dépendra d’éléments extra contractuels provenant de l’immeuble lui-même et de son environnement naturel. Ces derniers peuvent alors provenir de la volonté du législateur et c’est ainsi que l’immeuble pourra obéir à une finalité économique et sociale déterminée »  [17] .

8 Mélange des genres. Ce double niveau de destination, tantôt voulue, tantôt subie, engendre inévitablement certaines interactions afin d’assurer l’émergence de la destination de l’immeuble. La logique a priori dualiste connaît des influences positives ou, d’ailleurs, négatives, mais réciproques. Tout d’abord, la volonté du propriétaire, qui représente l’élément subjectif, n’est pas toute puissante. Elle doit parfois composer avec un objectivisme qui lui préexiste et qu’elle ne peut méconnaître. Ainsi, par exemple, dans le cadre d’une immobilisation par destination, il est communément admis que tel outil agricole est objectivement utile à l’exploitation du fonds rural. Il existe ici une destination normale de la chose qui préexiste à la volonté du propriétaire. Si le propriétaire décide par la suite « de l’affecter à l’usage de son fonds, l’immobilisation s’en trouvera facilitée, sans autre mode d’extériorisation de ce rapport de destination entre le meuble et l’immeuble »  [18] .

9 Au contraire, la volonté doit, de temps à autre, pour faire émerger une norme durable d’usage de la chose, s’extérioriser par des signes matériels. C’est ici le cas, toujours dans l’exemple de l’immobilisation par destination, de l’attache à perpétuelle demeure (C. civ., art 524 dernière al., art. 525) où la destination se fait plus subjective pour le meuble, objet d’ornementation ou somptuaire, d’un immeuble. Le meuble ne présente pas a priori d’utilité objective pour l’immeuble. C’est l’adhésion physique du meuble au support de l’immeuble auquel il est affecté qui vient extérioriser la volonté individuelle par des signes matériels remarqués  [19] et caractérisant l’existence d’un rapport d’utilité, et donc de destination entre eux. Ainsi donc, la destination de l’immeuble, tantôt voulue, tantôt subie, ne doit pas faire perdre de vue que l’une et l’autre, même si elles interagissent, sont coutumières d’une permanence dans sa réalisation.

10 Permanence de la destination de l’immeuble. Qu’elle soit voulue ou subie, la destination se doit d’être stable. Est-ce à dire qu’elle est figée pour l’éternité ? Certainement pas. A l’impossible, nul n’est tenu. La destination de l’immeuble, en dépit de la volonté des parties au contrat ou de la loi, n’est pas paralysée, en raison notamment de l’évolution de la situation de l’immeuble ou de ses caractères. Dans un tel cas, le changement de destination doit être justifié par des circonstances objectives extérieures à la volonté ou à l’action du sujet. C’est la nécessité de conserver la valeur d’usage de la chose qui sert de référentiel et non la convenance personnelle. Le changement de la norme d’usage est strict et l’utilisateur ne peut, par sa seule manifestation de volonté unilatérale, modifier la destination de son immeuble. Il faudra, là encore, des aménagements matériels ou formels visant à extérioriser la volonté de faire émerger une norme d’usage, et qui doivent apparaître afin de modifier ou de supprimer le rapport de destination. En atteste la cessation de l’immobilisation par destination, ce n’est pas simplement «  la volonté du propriétaire qui pourra faire perdre aux machines en cause leur qualité d’immeubles par destination, laquelle en l’absence d’enlèvement effectivement réalisé, ne disparaissait qu’après la vente  »  [20] . Le même parallélisme s’impose, à savoir la volonté et la séparation effective du meuble de l’immeuble sauf à bien sûr prendre en compte les exigences du contrat qui peuvent aussi prévoir de vendre le meuble d’un côté et l’immeuble de l’autre. La concrétisation de la volonté des parties dans l’acte juridique, et non plus la simple manifestation de volonté, prend ainsi le relais. Le voulu concrétisé dans l’acte juridique l’emporte ainsi. Mais, en tout état de cause, l’immobilisation cesse lorsque disparaît l’affectation du meuble au service de l’immeuble, ce qui impose un acte matériel ou juridique de séparation. Toute affectation unilatérale contraire, en revanche, en appelle à des sanctions civiles ou pénales sévères pour défaut de permanence de ladite destination.

11 Les sources de la destination de l’immeuble sont donc variées et peuvent mêler l’objectif et le subjectif. Il n’en demeure pas moins qu’elles font l’objet d’applications multiples en droit foncier.

B. Les applications variées de la destination de l’immeuble en droit foncier

12 Destination voulue en droit foncier. S’agissant de la destination de l’immeuble voulue par les parties, d’abord, il est possible de reprendre l’immobilisation par destination. Dans ce cas, il s’agit d’une destination contractuelle et non plus légale (telle que prévue aux articles 524 et 525 du Code civil). Un arrêt de la Cour de cassation du 11 janvier 2005  [21] , le rappelle à propos de matériels et de poissons d’une pisciculture cédés indépendamment du terrain sur lequel les bassins sont implantés. Ces derniers ne peuvent ainsi présenter le caractère d’immeubles par destination car les parties ont décidé par le contrat de les céder à des acquéreurs différents et de les séparer juridiquement. Du même coup, l’article 1622 du Code civil prévoyant une prescription annale de l’action ne leur est pas applicable puisqu’il régit exclusivement les actions fondées sur une erreur de contenance en matière de ventes d’immeuble et ne s’applique pas aux ventes de meubles. La destination est alors bel et bien dépendante de la volonté concrétisée dans le contrat entre les parties.

13 De même encore, l’immeuble donnée en location engage le preneur à bail à respecter raisonnablement la destination des lieux donnée par le bail. C’est, par exemple, la clause d’habitation bourgeoise qui interdit au preneur d’affecter les lieux à un autre usage que l’habitation et notamment de les utiliser à des fins commerciales. Dans ce cas, le bénéfice de la jouissance de l’immeuble est lié au respect d’une destination conventionnellement fixée par les parties et qui procède de l’initiative du propriétaire du bien. La destination dévolue à l’immeuble fait l’objet d’une mention expresse, garantissant sa connaissance et son acceptation par les deux parties contractantes. L’habitation exclusivement bourgeoise ne peut donc se présumer. Si rien n’est précisé, la liberté d’usage revient triomphante. En revanche, si la clause est expressément mentionnée, quelle en est sa portée ? Pendant longtemps, « nombreux sont les contrats, dans lesquels est stipulée « une clause d’habitation bourgeoise » ou une « clause d’usage exclusif d’habitation » »  [22] . La jurisprudence faisait une application stricte de celle-ci « en sanctionnant le locataire contrevenant, même en cas de compatibilité entre l’exercice d’une profession et d’habitation bourgeoise »  [23] . Mais, en réalité, « les évolutions contemporaines du droit positif ont modifié les données sous la poussée grandissante d’objectifs d’intérêt général, telles que la lutte contre la pénurie de logements, l’aide à la création d’entreprise ou la promotion de la liberté professionnelle »  [24] . Elles ont d’ailleurs contribué à quelques écarts d’appréciation. Pour preuve, dernièrement encore, lors de la mise en vente de lots de copropriété par une commune à un bailleur en vue d’en faire des logements sociaux, les syndicats de copropriétaire soutiennent que cette transformation contribue à «  une dégradation de leurs conditions de vie  » en ce qu’elle divise certains lots afin d’augmenter le nombre d’occupants de l’immeuble et que donc, elle est incompatible avec le respect de la «  destination de l’immeuble  » (qui s’apprécie «  au regard de son standing particulièrement élevé et de sa situation géographique  » et ce, «  même si le règlement de copropriété n’interdit pas expressément le logement social  »). Néanmoins, la Cour de cassation, dans son arrêt du 23 novembre 2017  [25] , considère que «  la dépréciation alléguée de la résidence était un préjudice individuel éventuellement subi par le copropriétaire lors de la vente de son bien, dont le prix était la résultante d’un ensemble de paramètres propres au lot concerné, et non un préjudice collectif  ». Les syndicats de copropriétaires n’avaient donc pas qualité à agir.

14 Pour le domaine économique, « la clause de destination commerciale est le pendant de la clause d’habitation bourgeoise. Elle a pour objet d’organiser le type d’activité qui peut être effectué par celui qui utilise les lieux »  [26] . Il peut s’agir d’établir le type de commerce qu’il convient d’effectuer et de respecter afin d’assurer une certaine cohérence pour le bailleur du centre  [27] qui va ainsi contrôler efficacement la bonne gestion de l’ensemble de ses emplacements. La clause peut être affinée en prévoyant un type de commerce particulier, comme celui de luxe. En revanche, « les parties peuvent exclure une destination précise du champ des utilisations possibles du bien-immeuble, objet du contrat. L’exemple le plus manifeste demeure dans la clause de non-concurrence relative au fonds transmis, par laquelle le propriétaire interdit à l’acquéreur ou à son locataire d’utiliser le bien selon une destination donnée »  [28] . Ainsi, un immeuble peut être vendu ou loué avec une clause comportant une interdiction d’effectuer un commerce déterminé. Là encore, la destination de l’immeuble en droit foncier se trouve régie par la volonté des parties contractantes.

15 Enfin, il y a encore la destination rurale de l’immeuble que l’on retrouve à l’occasion de la conclusion d’un bail rural. Il est un contrat par lequel un propriétaire agricole met à disposition d’un exploitant agricole des terres ou des bâtiments agricoles, en vue de les exploiter, en contrepartie d’un loyer ou d’un partage de récolte. Il s’applique exclusivement à un bien immobilier agricole, c’est-à-dire une terre ou un bâtiment d’exploitation à usage agricole. « L’immeuble-bâti ou non-bâti doit être à usage agricole. Traditionnellement, il s’agissait de la terre destinée à la culture ainsi que les bâtiments nécessaires à son exploitation. Mais, il est assez fréquent qu’un bail rural contienne un corps de ferme et qu’il porte sur des bâtiments agricoles et sur des bâtiments d’habitation »  [29] . Lorsqu’un même immeuble reçoit deux usages différents – pro parte rural, pro parte habitation ou commercial -, il faut rechercher celui qui forme le principal de l’accessoire afin de déterminer la nature de la convention. Dans ce cas, la qualification du bail s’apprécie à la date de sa conclusion et à l’aune de sa destination. C’est ce qu’a souligné la troisième chambre civile de la Cour de cassation dans un arrêt rendu le 6 septembre 2018  [30] en considérant qu’il ne faut pas s’intéresser à l’activité prépondérante lors de la délivrance du congé, mais à celle prépondérante au moment de la conclusion du bail. Or, lors de la conclusion du bail, il était prévu dans la clause de destination des lieux que les locaux loués ne servaient exclusivement qu’à l’élevage. Le bail est donc requalifié en bail rural, alors même qu’il avait été nommé bail commercial par les parties au moment de la signature de l’acte. L’évolution de l’activité était par conséquent sans incidence. Le statut des baux ruraux s’applique : la location d’un immeuble à usage agricole en vue de l’exploiter pour y exercer une activité agricole est régie par les dispositions du Code rural et de la pêche, sans que les parties puissent opter à leur guise pour l’application d’un autre régime  [31] . C’est au juge qu’il appartient alors de rétablir l’exacte qualification en vertu de l’article 12 du Code de procédure civile.

16 Destination subie. La destination de l’immeuble voulue par les parties est assortie ensuite d’une destination de l’immeuble, plus objective, et donc subie en droit foncier. C’est d’abord le cas en matière d’indivision légale où, selon l’article 815-9 du Code civil, «  chaque indivisaire peut user et jouir des biens indivis conformément à leur destination, dans la mesure compatible avec le droit des autres indivisaires et avec l’effet des actes passés au cours de l’indivision ». La liberté d’usage et de jouissance de l’immeuble se trouve ici tempérée par le respect de la destination et le droit des autres indivisaires  [32] . À la différence du propriétaire exclusif, l’indivisaire est tenu de respecter la destination de l’immeuble au nom de l’intérêt supérieur de l’indivision . Le partage ultérieur importe peu ; l’indivisaire agit comme membre d’une collectivité. C’est « la destination qui gouverne, pendant l’indivision, l’usage de l’immeuble, et assure une médiation entre intérêt individuel et intérêt collectif »  [33] . Ainsi, il en résulte qu’un indivisaire ne saurait user d’un immeuble d’habitation à sa guise et ce, par exemple, pour y exercer une activité professionnelle ou commerciale, quand bien même cette activité ne contrarierait pas la jouissance de ses pairs  [34] sous peine de voir sa responsabilité engagée.

17 Ensuite, dans le cadre des propriétés démembrées, l’usufruit est le droit de jouir de l’immeuble et d’en conserver la substance. Cela revient donc à la matière dont la chose est faite ainsi qu’à son utilisation et à sa destination  [35] . A cet effet, la jurisprudence a parfois interdit à l’usufruitier de transformer une maison d’habitation en maison de commerce  [36] . La sanction de l’atteinte à la substance de la chose par l’usage qui en est fait, peut conduire à la déchéance de l’usufruit et, donc à la perte de son droit  [37] . « L’affectation unilatérale est évincée, ce qui renforce inexorablement la permanence de la destination subie par l’usufruitier »  [38] . Conserver la substance de l’immeuble pour l’usufruitier, c’est aussi conserver sa destination.

18 Enfin, en matière de servitude, il s’agit ici d’une charge imposée sur l’héritage pour l’usage et l’utilité d’un autre héritage appartenant à un autre propriétaire. Encore faut-il préciser « que l’avantage procuré par la servitude soit en rapport avec la destination du fonds dominant. Ainsi, le droit d’user d’un pressoir peut constituer une servitude au profit d’un fonds à usage de vignobles, mais non au profit d’un immeuble d’habitation ; le droit d’extraire des pierres peut être une servitude au profit d’une carrière, mais non au profit d’un terrain à bâtir »  [39] . Le rapport d’usage et d’utilité doit coïncider parfaitement avec la destination de l’immeuble. C’est donc un critère d’utilité réelle qui se dégage (même si parfois l’utilité peut être acceptée de façon large ; la servitude n’a pas à être indispensable) de la servitude « en valorisant le fonds dominant et en lui procurant des avantages qui en accroissent la jouissance et l’exploitation au sens large »  [40] . D’ailleurs rien n’empêche le propriétaire de deux parcelles de les aménager de telle sorte que la première puisse profiter d’une ou plusieurs utilités procurées par la seconde. C’est le cas de passage de canalisations. Pour qu’il y ait juridiquement servitude, il faut nécessairement des fonds appartenant à deux propriétaires distincts. On ne peut avoir de servitude sur sa propre chose. Mais lorsque l’on vient à céder l’une de ses parcelles à un tiers, la servitude prend alors naissance. Il s’agit de la servitude de destination du père de famille  [41] supposant que le propriétaire ait procédé à un aménagement matériel entre les fonds, caractérisant l’existence d’un rapport d’utilité entre eux. Cet état de fait ne résulte pas d’un acte écrit mais d’une nécessaire extériorisation de la volonté individuelle par des signes matériels. Les tiers, acquéreurs respectifs des deux fonds divisés, peuvent ainsi par l’observation de l’aménagement être en mesure de connaître l’existence d’une servitude grevant ou bénéficiant à leur fonds. Il s’agit là d’une véritable réception de la destination de l’immeuble par les tiers qui sera transmise aux propriétaires ultérieurs. C’est la destination de l’immeuble initiée par le « père de famille » qui va être subie implicitement par les acquéreurs successifs des terrains eu égard à la configuration des lieux.

19 Modes de changement de destination et parallélisme des formes. Que la destination soit choisie ou encore subie, elle peut supporter des changements qui s’effectuent par le respect d’un parallélisme des formes. Dans la destination choisie, le consentement du propriétaire pour déterminer la destination de la chose est requis pour la modifier au cours de l’exécution du bail. D’une manière générale, d’abord, le législateur contemporain assouplit, dans certaines hypothèses, ce principe afin de permettre l’adaptation de l’exploitation aux circonstances économiques. Si le bail commercial connaît pour perdurer dans le temps la déspécialisation, il en va aussi de même en matière de bail rural où l’article L. 411-29 du Code rural et de la pêche maritime permet au preneur de modifier le mode de culture du fonds loué par le biais d’une autorisation du tribunal paritaire en cas de désaccord du bailleur. D’ailleurs, la possibilité de modifier la destination contractuelle peut être prévue a priori dans la convention. Elle est alors licite car elle ne procède pas de la volonté unilatérale et ultérieure du preneur mais de la volonté collective et initiale des parties.

20 A l’inverse, il arrive parfois que la loi puisse prévoir un changement possible de la destination des lieux sans l’accord du bailleur dans le cas où la nouvelle destination permettrait de satisfaire l’intérêt de la collectivité. Le secteur de l’immobilier s’y est cantonné en suscitant l’intervention du législateur qui n’a pas hésité à mettre en œuvre et à coordonner différentes mesures tant d’incitation (notamment fiscales), que de contrainte pour renforcer l’offre de logements.

21 Enfin, pour terminer, en matière d’indivision, la loi prévoit aussi, de manière symétrique, que le changement de destination suppose le consentement unanime des indivisaires. Ceci provient de la combinaison des articles 815-3 du Code civil et 815-9 du même Code. Déjà la jurisprudence avant la réforme de 1976 prévoyait cette règle en jugeant que chaque indivisaire «  peut user librement de la chose commune, à la condition ne n’en pas changer la destination sans le consentement unanime de tous les copropriétaires, et de ne causer ni trouble à la possession d’aucun d’eux  ».

22 Objectivation des changements de destination. Le changement de destination ne provient pas toujours de la convenance personnelle du sujet ou de la loi. C’est la nécessaire adaptation objective de la destination tant dans sa source, parce que ce sont des éléments extérieurs au sujet qui font naître l’exigence d’un changement que dans son contenu, puisque l’appréciation de la nécessité se fait eu égard à la valeur réelle de l’immeuble concerné. Nous prendrons deux exemples. D’abord, celui de l’usufruit dont M. Dockès « a bien mis en perspective la légitimité d’un changement de destination de la chose par l’usufruitier sans le consentement du nu-propriétaire «  lorsque les circonstances font du changement de destination une modalité de gestion nécessaire à la conservation du bien ou de son utilité, et que celle-ci n’accroît pas les risques de voir la propriété à terme du nu-propriétaire diminuer, le changement de destination peut être autorisé par le juge, ou être validé a posteriori, même lorsqu’il a été fait sans que le nu-propriétaire l’ait accepté » »   [42] . C’est la valeur d’usage du fonds qui vient légitimer la possibilité, pour l’utilisateur d’un bien, d’obtenir la modification de la destination, sans le consentement du propriétaire. On retrouve ici la référence à l’évolution des circonstances économiques  [43] . Une telle adaptation a été retenue, dans une affaire, où les nus-propriétaires s’opposaient au projet des usufruitiers de conclure un bail commercial dans le but d’affecter des terres agricoles à la construction et à l’exploitation d’une plate-forme de compostage de déchets organiques. La Cour de cassation  [44] a considéré que le bail commercial permettait ici d’adapter les activités agricoles à l’évolution économique et à la réglementation de l’environnement et que les juges du fond peuvent, en application de l’article 595 alinéa 4 du Code civil, autoriser un usufruitier à conclure seul un bail commercial sur une parcelle à vocation agricole si ce bail ne porte pas atteinte à la substance de la chose. Qui plus est, en l’espèce, le preneur s’engageait en fin de bail à remettre les lieux dans leur état d’origine.

23 Ensuite, en matière de servitude, l’adaptation de celle-ci au fonds dominant ou au fonds servant n’échappe pas à la même problématique d’alourdissement de la charge. Les servitudes ont une finalité essentiellement économique puisqu’elles tendent à permettre au propriétaire la meilleure utilisation du fonds. Si le propriétaire du fonds dominant peut adapter la servitude légale de passage en cas d’enclave en indemnisant le préjudice causé au propriétaire du fonds servant par l’augmentation qu’elle produit, qu’en est-il en matière de servitudes conventionnelles ? La réponse est a priori négative. « Parce qu’elles ont pour support le contrat et parce que le contrat, dans la lecture qui a été faite au XIX e  siècle de l’article 1103, est intangible et s’impose tant aux parties qu’au juge, on a déduit que les servitudes conventionnelles ne sauraient être adaptées aux besoins nouveaux du fonds dominant »  [45] . Pour autant, il est vrai que la rigueur du juge « varie selon que l’aggravation est indépendante de la volonté du propriétaire du fonds dominant  [46] (changement de véhicule : progrès technique) ou qu’elle résulte d’une utilisation plus intensive  [47] voire d’un changement d’affectation  [48]  »    [49] (juge de longue date que le changement d’affectation n’interfère pas sur la servitude de passage : exemple d’un changement de destination consécutif à la cessation de l’exploitation des vignes). De la même façon, le propriétaire du fonds servant peut aussi obtenir l’adaptation de la servitude qui grève son fonds. Si, en vertu de l’article 701 du Code civil, le propriétaire du fonds servant, «  ne peut rien faire qui tende à en diminuer l’usage ou le rendre plus incommode  », ne peut-il pas en obtenir une modification de son mode d’exercice ? Les codificateurs ont prévu que «  si l’assignation primitive de la servitude était devenue plus onéreuse au propriétaire du fonds assujetti, ou si elle empêchait d’y faire des réparations avantageuses, il pourrait offrir au propriétaire de l’autre fonds un endroit aussi commode pour l’exercice de ses droits, et celui-ci ne pourrait pas le refuser  » (C. civ., 701, al. 3). Cela s’applique couramment en matière de servitude de passage. Les frais engendrés par la modification de l’assiette de la servitude sont à la charge du propriétaire du fonds servant. Une remarque s’impose toutefois : « le cas où l’exploitation du fonds servant selon une destination nouvelle nécessiterait de restreindre l’exercice même de la servitude n’est pas envisagé. Pour autant, il est possible d’admettre de lege ferenda de la même manière qu’on peut défendre la possibilité judiciaire d’aggravation de la servitude afin de l’adapter à l’affectation nouvelle du fonds dominant à charge d’indemnité, la restriction de la servitude afin de permettre la meilleure exploitation possible du fonds servant »  [50] , et ce à charge d’indemnité. Les intérêts légitimes du propriétaire du fonds servant ne sauraient être sacrifiés sur l’autel de ceux du propriétaire du fonds dominant.

24 Notion évolutive et collective. La destination de l’immeuble en droit foncier n’est donc pas une notion figée. Tantôt subjective, tantôt objective, elle peut se trouver modifiée en fonction de certains changements de circonstances. Ce qui la caractérise, c’est le plus souvent l’usage de l’immeuble assorti d’une prise en compte de son utilité dans une dimension à la fois individuelle et collective, qu’elle résulte d’un contrat ou de l’affectation assignée à l’immeuble de par sa nature. Facteur de cohésion, la destination est un instrument qui va retentir forcément sur l’appréhension de la nature juridique des biens immobiliers et donc sur leur identité, tout en permettant de délimiter l’étendue des droits des propriétaires. Ce qui nous amène à envisager ses fonctions.

II. Les fonctions de la destination de l’immeuble en droit foncier

25 Les fonctions de la destination de l’immeuble sont duales. D’abord qualifiantes, la notion de destination de l’immeuble influe non seulement sur la nature du bien immeuble mais aussi sur celle du contrat ayant pour support l’immeuble. Il en résulte nécessairement un impact sur son régime juridique qui en appelle, ensuite, à une certaine régulation des rapports de droit entre les parties et vis à vis des tiers. Cette fonction équilibrante de la destination de l’immeuble se rattache à l’idée qu’elle se produit dans un but déterminé, à savoir de valorisation de l’immeuble et de balance des intérêts collectifs et individuels. Ce qui provoque un effet novateur sur la conception même du droit de propriété et de sa jouissance. Après les fonctions qualifiantes (A), c’est la fonction valorisante et équilibrante du marché foncier qu’il faudra envisager (B).

A. Fonctions qualifiantes : nature de l’immeuble et catégorisation de l’acte juridique

26 Influence de la destination sur la nature de l’immeuble. Si on raisonne, d’abord, sur l’immobilisation par destination, celle-ci vient directement influer sur la nature du bien. A l’origine mobilière, sa destination légale ou conventionnelle en fera un bien immeuble à part entière. Par sa nouvelle identité juridique, la destination immobilière va rejaillir sur la nature du transfert de propriété, la compétence des juridictions, la publicité et même la fiscalité applicable. Ensuite, plus que la nature du bien elle vient préciser l’accès de l’immeuble à la vie du droit. Finalement, l’immeuble n’est rien en lui-même, il accède à la vie du droit par la destination que lui confère son propriétaire, et donc par la pulvérisation de ses utilités  [51] . Ce qui permet déjà de substituer « à la vision de l’immeuble-chose-objet « qui se présente sans qualité entre les mains du sujet », celle de l’immeuble-chose-utile « pourvue d’une destination » et qui s’inscrit dans une totalité. L’immeuble, chose-utile, ne peut être approprié qu’à la mesure de ses utilités »  [52] . C’est donc la destination qui rend l’immeuble utile. La propriété individuelle de l’immeuble, jusque là absolue et exclusive, en ressort modifiée. « Nous ne sommes donc jamais propriétaire de la chose en elle-même, et nous n’avons qu’une place, à savoir un droit, dans la chose considérée »  [53] . Tout se fait dans une logique plus globale, de partage des utilités. La nouvelle conception de l’immeuble, en tant que chose-utile, fait que son usage est partagé en donnant accès à plusieurs titulaires.

27 Immeuble, une « chose-utile »   [54] . L’immeuble devient alors une chose utile dont on se sert et qui peut servir à quelque chose ou à quelqu’un, et non plus seulement une chose simplement appropriable. Par cette conception, si chère à Portalis pour qui «  les choses ne seraient rien pour le législateur sans l’utilité qu’en tirent les hommes  », la nature des biens pourrait connaître un profond bouleversement en ce que l’immeuble, matérialisé le plus souvent par le fonds immobilier, à savoir un bien matériel stricto sensu , se verrait ajouter l’idée d’un sol comme un milieu vivant et donc, comme une ressource. Le vivant en ferait ce bien inappropriable ou appropriable sous conditions, mais utile et commun à tous. La terre y aspire, comme l’arbre qui, lors d’un colloque à l’Assemblée nationale, a fait l’objet d’une Déclaration des Droits de l’arbre et s’est vu conféré la qualité d’être vivant fixe et sensible  [55] . La terre, et donc le sol, gagnerait à être considérée ainsi afin d’être mieux protégée, ce qui ferait naître « un droit spatial du XXI e  siècle par-delà les bornages traditionnels (droite/gauche ; urbain/rural ; agricole/environnement) »  [56] . La question qui se pose est alors de savoir : quel contrat veut-on passer avec la terre à l’avenir ? La terre ne doit plus être vue simplement comme objet mais comme partenaire. Elle est donc cette ressource-utile que l’on doit conserver d’une façon non artificialisée pour une partie d’entre elle. Reconnaître la terre comme une ressource vivante permettrait d’avoir une rationalisation des espaces pour l’intérêt de tous. Les impacts de l’artificialisation des sols sur l’agriculture sont modérés en termes de pertes de terres et de capacités productives mais sont très fortement ressentis au niveau local, notamment en zones périurbaines (pression foncière, fragmentation des territoires agricoles, difficultés d’exploitation). Et pourtant, l’artificialisation des sols répond aussi à des besoins des sociétés humaines et permet de satisfaire les multiples besoins en logement, en immobilier tertiaire, en zones économiques et en infrastructures de transport. L’équilibre s’impose désormais entre une protection du foncier rural et celui plus urbain  [57] . Est-ce donc par la destination renvoyant à la conception de l’immeuble utile qu’il serait possible d’y parvenir ?

28 Destination et nouvelle conception des biens immeubles. La destination ne remet pas en cause la distinction classique, si chère à notre Code civil, entre les meubles et les immeubles. Elle demeure une notion au service du bien immeuble qui le fait accéder au droit par son utilité réelle et parfois personnelle. La destination peut ainsi octroyer aux biens immeubles une nature vivante (terre non artificialisée) ou plus matérielle (terre artificialisée ; bâtiment…) en même temps qu’elle permet une affectation des biens à l’intérêt général ou à la protection de la personne. En définitive, la destination de l’immeuble en droit foncier augure une approche rénovée de la nature des biens immeubles qui, en tant que choses utiles, seront tantôt considérés comme biens vivants (ressource utile) ou biens inertes (objet utile), ce qui pourrait engendrer une protection différenciée selon les situations. Reste que la destination a une seconde vertu qualifiante en réalisant une catégorisation des baux.

29 Destination en tant que critère d’application du statut des baux immobiliers. La nature de certains baux immobiliers, ensuite, va aussi dépendre de leur destination. Il y a la clause d’habitation bourgeoise qui enjoint au preneur d’habiter bourgeoisement les lieux. De là, on peut concevoir une destination d’habitation exclusive qui est incompatible avec l’exercice d’une activité artisanale et commerciale mais qui peut parfois s’accommoder de l’exercice d’une profession libérale. Pour revenir à la destination commerciale proprement dite, l’application du statut des baux commerciaux (C. com., art. L. 145-1 et s.) suppose que les lieux loués soient affectés à l’exploitation d’un fonds de commerce ou d’une entreprise artisanale appartenant au locataire. La jurisprudence considère que c’est dans la commune intention des parties qu’il y a lieu de rechercher la nature de l’usage des lieux. C’est donc la destination conventionnellement dévolue aux lieux, c’est-à-dire leur exploitation industrielle, commerciale ou artisanale, qui entraîne l’application du statut des baux commerciaux. L’usage effectivement réalisé des lieux est ici évincé du processus de qualification du contrat. Pour la destination agricole, on peut voir qu’elle déclenche le régime des baux ruraux soumis au statut de fermage. « L’arrêt de principe est rendu par la Cour de cassation, le 19 avril 1947, qui prévoit : «  attendu que l’héritage rural dont la location constitue le bail à ferme s’entend du bien foncier destiné à la production agricole  »  [58]  »  [59] . L’article L. 411-1 du Code rural reprend d’ailleurs le critère de destination en y ajoutant l’utilisation professionnelle, à savoir l’exploitation réalisée. Pour entraîner l’application du statut de fermage, l’immeuble doit être exploité à un usage agricole. La destination agricole de l’immeuble constitue le critère de qualification de l’acte juridique conclu par les parties. Mais, encore faut-il une exploitation agricole. L’acte d’exploitation passant par le simple stockage de produits agricoles pour ceux qui en font le négoce, n’y suffit pas. Si plusieurs destinations apparaissent, c’est la destination prépondérante qui sera retenue.

30 « En présence d’une destination mixte, rurale et d’habitation ou rurale et commerciale, c’est le juge qui va s’employer à relever la destination prépondérante afin de retenir une qualification exclusive. Le juge n’est alors pas lié par la qualification formelle donnée à l’acte par les parties (CPC, art. 12) »  [60] . En définitive, malgré quelques différences, il apparaît qu’en matière de baux ruraux, commerciaux ou d’habitation, la destination des lieux voulue par les parties vient déclencher la catégorisation de l’acte juridique. Dans ce cas, on s’en tient à l’utilité personnelle de l’immeuble. C’est, à chaque fois, le régime protecteur de ces divers statuts, et donc l’application des règles spéciales de chacun, qui s’y trouve recherchée (avec la protection du preneur à bail).

31 Vers une protection et un meilleur équilibre du marché foncier. La destination vient non seulement guider la nature de l’immeuble, chose-utile, matérielle ou vivante, et la catégorisation des actes juridiques dans lequel l’immeuble en est le support, mais aussi organiser l’usage et donc, l’utilité future d’un bien en conciliant les droits individuels du propriétaire et la protection des intérêts collectifs, ce qui permet de la définir comme l’utilité de l’immeuble pour quelque chose ou quelqu’un (utilité réelle ou personnelle). Elle conditionne tant la valorisation de l’immeuble que l’équilibre et la préservation des espaces ruraux et urbains. Après les fonctions qualifiantes, c’est au tour de la fonction valorisante de l’immeuble et équilibrante du marché foncier que la destination de l’immeuble aspire en produisant nécessairement un effet novateur sur la conception du droit de propriété.

B. Fonction valorisante et équilibrante du marché foncier

32 Destination et valorisation de l’immeuble. En organisant l’usage et l’utilité future d’un bien, la destination valorise l’immeuble. C’est le cas, par exemple, de la servitude par destination de père de famille qui permet une redistribution des utilités offertes par le fonds dominant et le fonds servant dans une perspective économique de division des propriétés. La servitude en rapport avec la destination de l’immeuble, fonds dominant, en constitue un élément important dans la détermination de sa valeur. De même, le fait que le fonds fasse ou non l’objet d’une exploitation agricole ou économique, qu’il soit ou non constructible, a inévitablement des répercussions sur le prix de vente, ou du loyer, ou encore sur son estimation au moment de la donation. La Cour de cassation en témoigne dans un arrêt rendu le 31 octobre 1989  [61] à propos de parcelles de terres qui avaient fait l’objet d’une donation et qui, à l’époque, étaient «  à destination de terres cultivées  ». « Or, au moment du partage, elles étaient devenues à usage de prés à herbage de rentabilité inférieure. Une action en réduction du prix avait été intentée par l’héritière. Il fallait alors déterminer si, pour évaluer le bien, on devait tenir compte de sa destination initiale ou de sa nouvelle affectation »  [62] . Dans sa solution, la Cour de cassation prévoit que l’évaluation du bien se fait à l’aune de la destination initiale  [63] , nonobstant le changement ultérieur prévu. Ce qui ne va pas à l’encontre de la jurisprudence déjà rendue en 1977  [64] à propos d’un terrain agricole qui était devenu par la suite constructible car il avait bénéficié de l’extension de l’agglomération voisine. Ici, la Cour de cassation avait pris en compte la destination nouvelle afin d’apprécier la valeur du bien. Même si la décision à l’époque a fait l’objet de vives critiques en ce qu’elle considérait que «  la destination du bien à l’époque de la donation n’entrait pas en ligne de compte pour la détermination de son état  »  [65] , elle serait tout de même justifiable désormais en prenant tout simplement acte, en l’espèce, d’un changement de destination provenant d’éléments extérieurs à la volonté du gratifié, à savoir l’extension de l’agglomération voisine. La destination initiale est bel et bien un élément influant qui détermine la valeur de l’immeuble sauf à ce que son changement ultérieur vienne s’imposer par des éléments extérieurs à son propriétaire. La flexibilité de l’appréciation de la destination, déjà présente dans la valorisation de l’immeuble, se retrouve aussi dans une logique de protection et de contrôle de l’espace rural et urbain. Dernièrement encore, à propos du délaissement d’un terrain à la commune de Saint-Tropez par un propriétaire, la Cour de cassation  [66] a pu rappeler que la Convention européenne des droits de l’homme impose de l’indemniser dès lors qu’une quinzaine d’années après, la commune l’a revendu à un prix plus de quarante fois supérieur au prix d’achat en le rendant constructible. On assiste à un rééquilibrage au profit des droits fondamentaux de l’individu même si l’intérêt collectif demeure d’urbaniser au mieux les terrains.

33 Destination et respect équitable du rural et de l’urbain : à la recherche de nouveaux équilibres plus naturels et moins artificiels . Dans une logique de respect des équilibres territoriaux et de rationalisation des espaces entre la part notamment de rural et de l’urbain, la destination de l’immeuble a son rôle à jouer. Elle viendrait ici encadrer les usages qui en sont faits, en conciliant les droits individuels et les intérêts collectifs. Partons du sol, c’est l’immeuble par excellence et il est donc une ressource que l’on sait limitée en voie de raréfaction. C’est pourquoi, par exemple, la destination rurale de l’immeuble doit renvoyer, comme la destination commerciale ou d’habitation, à l’application de règles spéciales qui visent à protéger les biens investis d’une finalité particulière et, par conséquent, à réguler le marché foncier, celui de sa propriété et de sa jouissance, « pour permettre son partage et éviter son accaparement par des « autochtones » »  [67] . Si le contrôle des mutations immobilières de fonds ruraux était classiquement effectué jusqu’alors au moyen du mécanisme juridique de la préemption par le biais de la SAFER, il s’avère que certains auteurs  [68] préconisent aujourd’hui une autre façon de procéder (parfois moins politique) avec une régulation du marché foncier qui passerait par l’intervention d’une nouvelle loi foncière créant une autorité unique investie de prérogatives d’ordre public. Cette autorité unique serait appelée « l’Agence nationale pour le territoire qui arbitreraient entre les intérêts agricoles, commerciaux, résidentiels, environnementaux »  [69] . La régulation de l’appropriation du foncier permettrait ainsi, par exemple, de ne pas artificialiser trop de terres au profit de projets immobiliers inconsidérés. Le sol, en tant que bien-immeuble-utile, rend des services collectifs qu’il ne faut pas dilapider sous prétexte de constructions individuelles démesurées. Or, on sait que l’instauration d’un contrôle ici généralisé des usages immobiliers pourrait faire débat en ce qu’il porterait atteinte à certaines libertés dont celle d’entreprendre. Pour autant, cela existe déjà : « le droit de l’urbanisme régit le droit de construire et d’aménager, le droit de l’environnement les travaux qui présentent des impacts sur le milieu naturel ou les populations voisines, le droit rural l’exploitation agricole des fonds, le droit de l’énergie l’installation des centrales de production d’électricité, le droit économique, l’implantation des surfaces commerciales »  [70] . Chaque secteur du droit envisage ses propres normes, ce qui complexifie la réglementation et vient décourager les porteurs de projet. Son domaine d’action couvrirait tous les types d’usage de l’immeuble, agricoles ou autres, puisqu’il s’agirait de rationaliser l’occupation de l’espace. D’ailleurs, à côté de cette intervention législative, il serait bon aussi de susciter un autre élan chez les praticiens du droit cette fois-ci qui donneraient libre cours à leur créativité en amont « par le biais de conventions particulières régissant les différents usages de l’immeuble, qu’il s’agisse du fonds de terre ou des bâtiments (droits réels de jouissance spéciale ; baux réels solidaires ; acquisition avec cahier des charges, contrats de crédit-bail, droits de superficie, droits de jouissance collective ou alternée, copropriété des immeubles non bâtis avec des parties privatives et des parties communes pour l’eau, les chemins, les ouvrages hydrauliques… ) »  [71] , ce qui retranscrit bien la volonté de partager à plusieurs les jouissances du foncier en dépassant la rigidité actuelle de certains statuts spéciaux, comme le fermage par exemple. Les utilités de la terre y sont partagées mais contrôlées pour un meilleur équilibre entre les besoins respectifs économiques, sociaux et environnementaux.

34 Destination et partage des utilités : vers un renouveau de la propriété. Tout en maintenant la propriété privée du sol, et partant de l’immeuble, mais en modifiant sa signification qui se veut plus protectrice des intérêts de la collectivité, la régulation des rapports de droit se produit dans un but déterminé et a un effet novateur sur le droit de la propriété. Le mythe de la propriété absolue et exclusive portant sur l’immeuble-objet laisse sa place à un droit de propriété aux utilités partagées sur l’immeuble-utile, ce qui lui permet d’assumer pleinement sa fonction sociale. Il s’agit de partir de l’idée d’un patrimoine commun dont personne ne doit être exclu. La volonté de protéger certains biens immeubles, certains utilisateurs ou encore certains usages y est toujours présente. Derrière la destination de l’immeuble, en tant que donnée plus collective, se profile donc une volonté de protéger et d’équilibrer le marché foncier au profit de l’intérêt de tous. La destination de l’immeuble parviendra-t-elle à être ce nouvel instrument contraignant qui permet au propriétaire de protéger sa chose-utile en même temps qu’elle restreint ses pouvoirs pour une meilleure conciliation des intérêts et mise en valeur de notre droit foncier, qu’il soit rural ou urbain ?

Citer cet article

  • REBOUL-MAUPIN Nadège.
  • REBOUL-MAUPIN, Nadège.
  • REBOUL-MAUPIN, N

https://doi.org/10.3917/dv.088.0109

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Les articles du Code civil qui désignent les biens qui désignent les immeubles par destination, permettent à la volonté de s'affranchir des limites strictement matérielles de la summa divisio. Mais pour produire des effets aussi importants que la transformation de la nature juridique d'un meuble, la volonté doit présenter une certaine stabilité qu'elle ne peut acquérir que lorsque le rapport de destination entre les deux biens lui permet de se révéler avec objectivité. Toutefois, l'interprétation du Code civil s'est faite au-delà de ces considérations élémentaires en faisant de la dimension objective de la volonté un réseau de conditions distinctes d'elle, dénaturant le mécanisme et entachant sa mise en œuvre. Il faut considérer le critère de destination comme l'idée générale en vertu de laquelle est organisée la matière des immeubles par destination et reconnaître à la destination le pouvoir de justifier à elle seule l'immobilisation, en faisant d'elle le critère exclusif et autonome de la qualification.

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Immeuble par destination

L’immeuble par destination vise tout meuble accessoires à l’immeuble [1] , c’est-à-dire un bien qui, « dans la mesure où ils appartiennent à la même personne, est soit attaché ou placé à demeure, soit est mis au service de l’exploitation ou de la sauvegarde de ce bien principal »  [2] .

_______________

[1] Code civil, art. 3.47, al.4

[2] Code civil, art. 3.9, al. 1 er

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Exemple de dissertation juridique

Publié le 26 novembre 2018 par Justine Debret . Mis à jour le 7 décembre 2020.

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Sujet  : « La spécificité du droit administratif. »

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Debret, J. (2020, 07 décembre). Exemple de dissertation juridique. Scribbr. Consulté le 11 septembre 2024, de https://www.scribbr.fr/dissertation-fr/exemple-dissertation-juridique/

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3. La réforme des sûretés et le gage d’immeuble par destination

R éforme du droit des sûretés : ce qui change au 1er janvier 2022

L’ordonnance du 15 septembre 2021 autorise le gage d’immeubles par destination.

Cette innovation, consacrée par le nouvel article 2334 du Code civil , concernera dès le 1er janvier 2022 des biens meubles considérés par la loi comme des immeubles selon les critères édictés par l ’article 524 du Code civil . En pratique, cela concerne notamment des panneaux solaires, des turbines, des machines industrielles, des éoliennes, etc., qui peuvent représenter une forte valeur.

Jusqu’à présent, de tels biens ne peuvent pas faire l’objet d’un gage, cette sûreté étant réservée aux meubles.

L’objectif – augmenter la capacité d’emprunt des propriétaires – est louable ; des difficultés pourraient toutefois surgir face à un créancier hypothécaire inscrit sur l’immeuble abritant un immeuble par destination. Le principe, en matière d’hypothèque, est que celle-ci s’étend de plein droit aux accessoires et améliorations de l’immeuble, ce qui inclut l’immeuble par destination.

Le Code civil règle ce conflit en accordant la priorité au créancier ayant inscrit sa sûreté en premier. Toutefois, hypothèques et gages ne figurent pas sur les mêmes registres, ce qui complique sérieusement la connaissance par les parties de leur existence et fait courir des risques aux créanciers.

Retrouvez l’éclairage de Coralie Leveneur dans « La réforme des sûretés et le gage d’immeuble par destination » paru au JCP N n° 47 – 26 novembre 2021, 1332 [accès abonnés]

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immeuble par destination dissertation juridique

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La distinction des immeubles en droit des biens

En droit des biens, plusieurs distinctions existent. Parmi celles-ci, l’une des plus fondamentales réside dans l’opposition entre les biens et les immeubles, précisée en ces termes par l’article 516 du Code civil : « tous les biens sont meubles ou immeubles ». Cette distinction est souvent décrite comme étant la summa divisio.

Si l’on se limite aux immeubles, ceux-ci comportent eux-mêmes leur propre distinction. En effet, l’article 517 du Code civil précise que « les biens sont immeubles, soit par leur nature, soit par leur destination, soit par l’objet auquel ils s’appliquent ».

Ainsi, les immeubles, contrairement à ce que pourraient croire les personnes non instruites dans le domaine juridique, ne sont pas une catégorie unique constituée par des bâtiments, mais ressortent de trois catégories distinctes : les immeubles par nature, les immeubles par destination, et les immeubles par l’objet auquel ils s’appliquent. Les articles 518 à 526 du Code civil précisent ces différentes catégories.

Les immeubles par nature sont les plus connus. Sont inclus dans cette catégorie les bâtiments, le sol et le sous-sol, ainsi que les végétaux (lorsqu’ils ne sont pas coupés, détachés ou abattus) et les accessoires qui sont attachés à un bâtiment, comme les canalisations.

Vient ensuite la catégorie des immeubles par destination. Il devrait en réalité s’agir de meubles, mais par l’effet d’une fiction juridique, ils vont être considérés comme étant des immeubles. En effet, un lien particulier va permettre de les rattacher à un immeuble. C’est le cas lorsqu’ils sont affectés au service et à l’exploitation d’un immeuble (un tracteur ou un outil industriel par exemple, mais également des animaux utilisés par une exploitation agricole). C’est aussi le cas lorsqu’ils sont attachés à un immeuble à perpétuelle demeure (une statue placée dans une niche ou une cheminée encastrée dans un mur constituent les exemples les plus fréquents).

La dernière catégorie concerne les immeubles par l’objet auquel ils s’appliquent. Ceux-ci sont précisés par l’article 526 du Code civil : l’usufruit des choses immobilières, les servitudes ou services fonciers, les actions qui tendent à revendiquer un immeuble.

Parvenir à distinguer si une chose est un meuble ou un immeuble est important en droit. En effet, cela peut avoir des conséquences sur les points suivants :

– détermination du tribunal compétent, – modes et formalités d’acquisition de la propriété, – preuve de la propriété, – fiscalité.

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immeuble par destination dissertation juridique

Qu’est-ce qu’un immeuble? Les notions d’immeuble par nature, par destination et par objet

  • décembre 13, 2019
  • No Comments

L’article 517 du Code civil dispose que «  les biens sont immeubles, ou par leur nature, ou par leur destination, ou par l’objet auquel ils s’appliquent . »

Ainsi existe-t-il trois catégories d’immeubles dont il ressort, à l’analyse, que l’immeuble se caractérise par sa fixité, en ce sens qu’il ne peut pas être déplacé contrairement aux meubles qui se caractérisent par leur mobilité.

I) Les immeubles par nature

L’article 518 du Code civil dispose que «  les fonds de terre et les bâtiments sont immeubles par leur nature.  »

La catégorie des immeubles par nature, qui repose sur le critère physique, comprend donc le sol et tout ce qui est fixé au sol :

  • Le sol : par sol il faut entendre le fonds de terre, ce qui comprend, tant la surface du sol, que le sous-sol
  • D’une part , toutes les constructions qui sont édifiées sur le sol ou dans le sous-sol (bâtiments, canalisations, les piliers ou poteaux fixés par du béton, ponts, barrage etc.)
  • D’autre part , tous les végétaux (arbres, plantes, fleurs etc), avec cette précision que s’ils sont détachés du sol ils deviennent des meubles ( art 520 C. civ .)

La jurisprudence a eu l’occasion de préciser qu’il est indifférence que la chose soit fixée au sol à titre provisoire ou définitif. En tout état de cause, dès lors qu’elle adhère au sol elle est constitutive d’un immeuble par nature.

II) Les immeubles par destination

À la différence des immeubles par nature qui sont déterminés par un critère physique, les immeubles par destination reposent sur la volonté du propriétaire.

Il s’agit, plus précisément, de biens qui, par nature, sont des meubles, mais qui sont qualifiés fictivement d’immeubles en raison du lien étroit qui les unit à un immeuble par nature dont ils constituent l’accessoire.

Tel est le cas, par exemple, du bétail affecté à un fonds agricole et qui donc, par le jeu d’une fiction juridique, est qualifié d’immeuble par destination.

L’objectif recherché ici est de lier le sort juridique de deux biens dont les utilités qu’ils procurent sont interdépendantes.

Par la création de ce lien, il sera, dès lors, beaucoup plus difficile de les séparer ce qui pourrait être fortement préjudiciable pour leur propriétaire.

Ainsi, des biens affectés au service d’un fonds, devenus immeubles, ne pourront pas faire l’objet d’une saisie par un tiers indépendamment du fonds lui-même.

A) Conditions de l’immobilisation par destination

L’immobilisation par destination d’un bien est subordonnée à la réunion de deux conditions cumulatives :

  • D’une part , les deux biens doivent appartenir au même propriétaire
  • D’autre part , le meuble doit être affecté au service de l’immeuble

==> Sur l’appartenance du meuble et de l’immeuble au même propriétaire

Pour que l’immobilisation par destination d’un meuble puisse s’opérer, il est nécessaire qu’il appartienne au même propriétaire de l’immeuble.

L’opération repose, en effet, sur la volonté du propriétaire d’affecter un bien au service d’un autre de ses biens. L’immobilisation par destination ne peut donc se concevoir que si les deux biens relèvent du même patrimoine.

Il en résulte dans l’hypothèse où le locataire d’un immeuble, affecte un meuble au service de cet immeuble, l’immobilisation par destination ne sera pas possible.

==> Sur l’affectation d’un meuble au service d’un immeuble

Pour que l’immobilisation du meuble puisse s’opérer, il doit exister un rapport de destination entre ce meuble et l’immeuble.

Plus précisément, il est exigé que le meuble affecté au service de l’immeuble soit indispensable à son exploitation, de sorte que la seule volonté du propriétaire, si elle est nécessaire, ne suffit pas à réaliser l’immobilisation par destination.

À cet égard, il ressort de l’article 524 du Code civil que le lien de destination qui existe entre un meuble et un immeuble peut être soit matériel, soit économique, de sorte qu’il convient de distinguer deux sortes d’immobilisation d’un meuble par destination.

  • Le bien est ici affecté à l’exploitation économique du fonds, de sorte que le meuble et l’immeuble entretiennent un rapport de destination objectif entre eux.
  • Le meuble est, en effet, utile à l’immeuble auquel il est affecté.
  • Il en résulte qu’il n’est pas besoin qu’existe un lien matériel entre les deux biens, soit que le meuble soit incorporé ou fixé physiquement à l’immeuble.
  • Ce qui importe, et c’est là une condition qui a été posée par la jurisprudence qui ne ressort pas d’une lecture littérale du Code, c’est que le bien qui fait l’objet d’une affectation soit indispensable à l’exploitation du fonds (V. en ce sens Req. 31 juill. 1879, DP 1880. 1. 273, S. 1880. 1. 409, note C. Lyon-Caen ).
  • Par indispensable, il faut comprendre que si le bien n’était pas affecté au service de l’exploitation du fonds, sa valeur s’en trouverait diminuée.
  • À cet égard, l’article 524 du Code civil établit une liste de meubles qui sont présumés être indispensables à l’exploitation de l’immeuble.
  • Les animaux que le propriétaire du fonds livre au fermier ou au métayer pour la culture ( 522 C. civ .) ainsi que ceux que le propriétaire d’un fonds y a placés aux mêmes fins ( art. 524, al. 2 C. civ. ), y compris les ruches à miel ( art. 524, al. 6 C. civ. )
  • Les outils et le matériel agricole et autres ustensiles aratoires, pressoirs, chaudières, alambics, cuves et tonnes ( 524, al. 4 et 7 C. civ. )
  • Les semences données aux fermiers ou métayers ( 524, al. 5 C. civ. ) ou encore les pailles et engrais ( art. 524, al. 9 C. civ. )
  • L’article 524 du Code civil prévoit que «  sont immeubles par destination, quand ils ont été placés par le propriétaire pour le service et l’exploitation du fonds […] les ustensiles nécessaires à l’exploitation des forges, papeteries et autres usines ».
  • Il ressort de cette disposition que sont ici visés tous les biens susceptibles d’être affectées à l’exploitation d’une activité industrielle, soit plus précisément à des immeubles au sein desquels sont fabriqués des produits et des marchandises.
  • La liste établi par l’article 524 du Code civil n’est pas exhaustive de sorte d’autres cas sont susceptibles d’être envisagés.
  • Il en va notamment ainsi de l’affectation d’un bien au service d’un fonds à des fins commerciales
  • Les outils ou les machines affectées à l’exploitation d’un fonds de commerce peuvent ainsi être qualifiés d’immeubles par destination.
  • Peuvent également être qualifiés d’immeubles par destination les meubles garnissant un hôtel ou un restaurant.
  • Le lien qui existe ici entre le bien immobilisé et l’immeuble n’est pas de nature économique, en ce sens qu’il est indifférent que le bien soit utile ou indispensable à l’exploitation du fonds.
  • Ce qui est déterminant ici c’est l’existence d’un lien matériel (une attache) entre le meuble et l’immeuble qui exprime la volonté du propriétaire de créer un rapport de destination.
  • Dans un arrêt du 18 octobre 1950, la Cour de cassation a précisé que l’attache doit se manifester par «  des faits matétiels d’adhérence et durable » ( civ., 18 oct. 195 )
  • Quant au Code civil, il précise à l’article 525 les différentes modalités d’attache qui présument l’intention du propriétaire d’affecter un bien à un fonds
  • Soit ils y sont scellés en plâtre ou à chaux ou à ciment
  • Soit lorsqu’ils ne peuvent être détachés sans être fracturés ou détériorés, ou sans briser ou détériorer la partie du fonds à laquelle ils sont attachés
  • Soit quand il s’agit de glaces, de tableaux ou d’ornements fixées dans un appartement lorsque le parquet sur lequel elles sont attachées fait corps avec la boiserie.
  • Soit quand il s’agit de statues, lorsqu’elles sont placées dans une niche pratiquée exprès pour les recevoir, encore qu’elles puissent être enlevées sans fracture ou détérioration.
  • Au bilan, l’attache à perpétuelle demeure se déduit de la nature du lien matériel qui existe entre le bien affecté et l’immeuble.
  • La question qui est alors susceptible de se poser est de savoir à quel niveau se situe la frontière entre les biens attachés à perpétuelle demeure et les immeubles par nature.
  • Tandis que les biens immobilisés par nature sont indissociablement liés, les biens immobilisés par destination conservent leur individualité propre
  • Lorsque le bien est immobilisé par nature, la cause de cette immobilisation est indifférente : il importe peu que les propriétaires du bien immobilisé et de l’immeuble soient des personnes différentes
  • Tel n’est pas le cas pour les immeubles par destination qui, pour être qualifiés ainsi, doivent relever du même patrimoine que celui dans lequel figure le fonds au service duquel ils sont affectés.

C) Cessation de l’immobilisation par destination

S’il peut être mis fin à l’immobilisation d’un bien par destination, cette opération est subordonnée à l’observation de deux conditions cumulatives.

  • La cessation de l’immobilisation par destination doit être voulue par le propriétaire
  • Il en résulte qu’elle ne peut pas être subie dans le cadre, par exemple, d’une saisie ou encore consécutivement à l’action d’un tiers
  • Si la volonté du propriétaire est nécessaire à la cessation de l’immobilisation d’un bien par destination, elle n’est pas nécessaire.
  • Soit par l’accomplissement d’un acte matériel qui consistera à séparer le meuble immobilisé de l’immeuble
  • Soit par l’accomplissement d’un acte juridique qui consistera en l’aliénation séparée des deux biens (V. en ce sens 1 ère civ. 11 janv. 2005 ).

III) Les immeubles par l’objet

L’article 526 du Code civil prévoit que sont immeubles, par l’objet auquel ils s’appliquent:

  • L’usufruit des choses immobilières ;
  • Les servitudes ou services fonciers ;
  • Les actions qui tendent à revendiquer un immeuble.

Le point commun entre ces trois catégories est qu’elles recouvrent toutes des biens incorporels. Plus précisément, il s’agit de biens envisagés comme des droits, lesquels droits portent sur des immeubles.

Le législateur a ainsi considéré que lorsqu’un droit a pour objet un immeuble, il endosse également, par contamination, le statut d’immeuble. On parle alors de droit réel immobilier.

À cet égard, l’article 526 du Code civil étend la catégorie des immeubles par l’objet aux actions de justice qui sont relatives aux immeubles.

À l’examen, au nombre des biens immobiliers par l’objet figurent :

  • L’usufruit immobilier
  • Les servitudes ou services fonciers
  • Le droit d’usage et d’habitation
  • L’emphytéose
  • Le bail à construction, à réhabilitation ou réel immobilier
  • L’hypothèque
  • Le gage immobilier
  • Les privilèges immobiliers
  • L’article 526 du Code civil que sont des immeubles par l’objet «  les actions qui tendent à revendiquer un immeuble. »
  • Le périmètre envisagé par cette disposition est ici trop restreint.
  • En effet, doivent plus généralement être qualifiées d’immobilières toutes les actions en justice qui visent à exercer un droit réel immobilier principal ou accessoire.
  • Tel est le cas de l’action confessoire d’usufruit ou de servitude ou bien de l’action hypothécaire.

Aurélien Bamdé

Aurélien Bamdé

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Deux cas pratiques en droit civil - Les biens meubles et immeubles

Thèmes abordés.

Cas pratiques, droit civil , biens meubles , biens immeubles , achat d'un domaine viticole, article 516 du Code civil , article 528 du Code civil , qualification juridique

Résumé du document

La situation de Monsieur Pierre, conduit à envisager les différentes classifications des biens, meubles ou immeubles, et leur régime juridique, à la suite de l'achat d'un domaine viticole. Un acquéreur a acquis un domaine viticole qui produit des vins et liqueurs de fruits. Des éléments du domaine semblent ne pas avoir suivi la vente du domaine viticole : le mini-tracteur servant à l'entretien du domaine, les jeunes pousses d'arbres fruitiers conditionnées dans des bacs, l'étiqueteuse, une grande partie du vin non encore tiré des tonneaux, et quelques chèvres. L'acquéreur peut-il réclamer ces biens ? Lesquels ?

  • Concernant le mini-tracteur
  • Concernant les jeunes pousses d'arbres fruitiers conditionnées dans des bacs
  • Concernant l'étiqueteuse
  • Concernant le vin non encore tiré des tonneaux
  • Concernant les chèvres
  • Concernant les convecteurs électriques
  • Concernant le miroir trumeau
  • Concernant les statues dans de petites niches
  • Concernant les meubles de cuisine sur mesure
  • Concernant la serre
  • Concernant les fruits et légumes ainsi que la dernière récolte

[...] Le mini-tracteur devait donc suivre la vente du domaine viticole. L'acquéreur peut réclamer le mini-tracteur, sauf s'il est démontré que ce bien n'appartenait pas au vendeur du domaine viticole. B. Concernant les jeunes pousses d'arbres fruitiers conditionnées dans des bacs En l'espèce, les jeunes pousses d'arbres fruitiers conditionnées dans des bacs sont à première vue des biens meubles par nature au sens de l'article 528 du Code civil, en ce que ce sont des biens mobiles, transportables. Néanmoins, ces jeunes pousses qui se trouvaient dans un domaine viticole étaient destinées à l'exploitation du domaine viticole pour la production de vin et de liqueur de fruit. [...]

[...] Concernant les chèvres En l'espèce, les animaux sont considérés comme des biens meubles en droit français. Les chèvres du domaine viticole sont donc des biens meubles susceptibles d'être des immeubles par destination si elles servaient à l'exploitation ou service du fond. Or il est très improbable que ces chèvres soient d'une quelconque utilité pour la production de vin. Elles ne répondent ainsi pas à la première condition de l'article 524 concernant les immeubles par destination. L'acquéreur ne pourra donc pas réclamer les chèvres qui ne sont d'aucune utilité pour le domaine viticole. [...]

[...] Néanmoins, l'arrêt de la 1re chambre civile 5 mars 1991 de la Cour de cassation, a considéré qu'un bien meuble conçu aux dimensions exactes de la pièce, était un immeuble par destination attachée au fond à perpétuelle demeure. Ainsi il est plus que probable que le fait que ces meubles soient sur mesure entraîne la qualification d'immeuble par destination attaché au fond à perpétuelle demeure. Le couple ne pourra donc pas récupérer ces meubles de cuisine sur mesure. E. Concernant la serre En l'espèce, la serre est fixée dans le jardin. [...]

[...] Le couple a voulu attacher le bien meuble au bâtiment en installant une des niches pour les accueillir. L'alinéa 4 de l'article 525 du code civil, précise que si les niches ont été construites spécialement pour recevoir ces statues alors les statues sont immeubles par destination, attachées au fond à perpétuelle demeure. Les conditions de l'immeuble par destination attaché au fond à perpétuelle demeure sont donc remplies : volonté du propriétaire de l'attacher au fond et fait matériel d'adhérence durable traduit par les niches. [...]

[...] Comme l'étiqueteuse se trouvait dans le domaine viticole avant d'avoir disparu, il est très probable que ce bien appartenait à l'ancien propriétaire du domaine viticole. L'étiqueteuse remplit ainsi les conditions d'immeuble par destination placé au service ou à l'exploitation d'un fond au sens de l'article 524 du Code civil. Ainsi l'étiqueteuse est un bien immeuble par destination, affecté à un fonds pour son service ou son exploitation. Ce bien devait donc suivre la vente du domaine viticole. L'acquéreur peut le réclamer, sauf s'il est démontré que ce bien n'appartenait pas à l'ancien propriétaire du domaine viticole. D. [...]

  • Nombre de pages 4 pages
  • Langue français
  • Format .doc
  • Date de publication 05/02/2021
  • Consulté 51 fois
  • Date de mise à jour 08/02/2021

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Blog-07-2024

Raphaël BRIGUET-LAMARRE

Ex-avocat & enseignant ( Master 2 DPRT - Paris II),  présente

L'article :

  • Fiction juridique : définition et exemples

• Publié:  10/09/2024

• Mis à jour: 10/09/2024

• Lecture: 22 min

Fiction juridique- Aideauxtd.com

Méthodologie juridique

Une fiction juridique est un procédé de technique juridique, issu du droit romain, qui consiste pour le législateur à supposer un fait contraire à la réalité en vue de produire un effet de droit.

Par exemple, l’adage « infans conceptus » (l’enfant est considéré comme né chaque fois qu’il s’agit de son intérêt) constitue une fiction juridique. Le législateur suppose un fait contraire à la réalité (il qualifie un enfant simplement conçu de « personne ») en vue de produire un effet de droit (conférer des droits à l'enfant à naître, comme il le ferait pour une personne).

I. Définition de la fiction juridique

Comme nous venons de le dire, il est possible de définir la fiction juridique comme un procédé de technique juridique, issu du droit romain, qui consiste pour le législateur à supposer un fait contraire à la réalité en vue de produire un effet de droit. Le législateur fait « comme si » une situation était conforme à la réalité afin de produire des effets de droit. Le « comme si » constitue une négation volontaire, consciente de la réalité. Les fictions juridiques sont fréquemment annoncées dans les textes par les expressions « est censé » ou « est réputé » et prennent souvent la forme d’adages (par exemple, « nul n’est censé ignoré la loi »).

Sachez toutefois que les auteurs ne s’accordent pas sur une définition unitaire de la fiction juridique (bien que la plupart des définitions soient toutes semblables). Par exemple, Henry Duméril donne la définition suivante : « [e]n matière de droit, on entend d'une manière large par Fiction, la supposition, contraire à la réalité, d'un fait ou d'une qualité, supposition destinée à produire certains effets juridiques […] » ( H. Duméril, Les Fictions juridiques : RGD 1882, p. 5 ). Le lexique des termes juridiques de Dalloz donne la définition suivante : « Procédé de technique juridique permettant de considérer comme existante une manifestation contraire à la réalité. La fiction permet de déduire des conséquences juridiques différentes de celles qui résulteraient de la simple constatation des faits » ( S. Guinchard, T. Debard, Lexique des termes juridiques, 24e éd. 2016, Dalloz ).

Comment s’y prend le législateur ?

La fiction juridique est un procédé de technique juridique, un artifice utilisé par la loi. Le législateur déforme volontairement une catégorie juridique. L’idée est d’inclure dans une catégorie juridique une entité qui n’est pas censée y être incluse. Il fait « comme si » une situation existait. C’est un « moyen d’étendre le domaine d’application d’une règle donnée, en niant consciemment la réalité » ( J. Bart, Fictio juris, Littératures classiques, n°40, 2000. Droit et littérature. pp. 25-33 ). La fiction fonctionne ainsi comme une exception à un principe ( F. Rouvière, Critiques des fonctions et de la nature des fictions, Les artifices du droit : les fictions, LGDJ-Lextenso, Centre Michel de l’Hospital, 2015, p.83-101 ).

Les fictions juridiques étaient déjà utilisées dans le droit romain. Vous étudierez sûrement brièvement ce concept dans le cours d’introduction historique au droit. Par exemple, pendant la période de la République (509 – 27), le « préteur », magistrat qui rendait la justice à Rome en instruisant les procès, avait élargi certaines actions prévues par la loi en introduisant dans leur formule une fiction juridique notamment pour permettre à des étrangers d’être jugés ou de poursuivre un étranger (une formule devait être prononcée par un citoyen devant le préteur pour pouvoir mener une action en justice). Par exemple, en matière de vol, la fiction suivante avait été introduite « civitas romana peregrino fingitur » soit « la citoyenneté romaine étant feinte pour le pérégrin » ( J. Bart, Fictio juris, In: Littératures classiques, n°40, 2000. Droit et littérature. pp. 25-33 ). Cette fiction permettait de faire « comme si » un étranger était citoyen romain, ce qui n’était pas le cas.

II. Exemples de fictions juridiques

Nous allons donner deux exemples concrets en mettant l’accent sur les deux éléments de la définition de la fiction juridique pour mieux comprendre ce concept.

(1) Premier élément : le législateur suppose un fait contraire à la réalité

Le législateur suppose un fait contraire à la réalité et déforme volontairement une catégorie juridique. L’idée est d’inclure dans une catégorie juridique une entité qui n’est pas censée y être incluse. Il fait « comme si » une situation existait. La fiction juridique « fait violence à la réalité » ( H. Rabault, La logique juridique, ed n°1, 2024, p. 72 ).

Exemple n°1 – L’adage infans conceptus

Prenons à nouveau l’exemple de l’adage infans conceptus qui constitue une fiction juridique (« l’enfant est considéré comme né chaque fois qu’il s’agit de son intérêt »).

En principe, un « enfant à naître » (soit un fœtus) ne possède pas la personnalité juridique. En effet, le droit pose des conditions pour pouvoir acquérir la personnalité juridique. Il faut notamment naître vivant et viable (ce qui exclut donc le fœtus, encore dans le ventre de sa mère). Si l’on s’en tient à la réalité, l’enfant à naître n’appartient donc pas à la catégorie juridique de « personne ».

Cette absence de personnalité peut poser des problèmes en termes d'équité.

En effet, le fait de fixer le début de la personnalité juridique à la naissance peut conduire à des solutions injustes. Par exemple, en privant de succession un enfant né quelques jours seulement après la mort de son père. L'adage infans permet de corriger certains de ces problèmes. En effet, par l’application de cet adage, l’enfant à naître va pouvoir, comme une « personne », bénéficier de droits (par exemple en pouvant succéder).

La catégorie juridique de « personne » est donc volontairement déformée, car on y inclut un « enfant à naître » soit une entité qui ne satisfait pas les conditions requises, en principe, pour pouvoir bénéficier de la personnalité juridique. Un fait contraire à la réalité est supposé : le législateur fait « comme si » l’enfant à naître (qui appartient en principe à la catégorie juridique de « fœtus ») était une personne. Il y a une sorte d’« extension » de la catégorie juridique de personne.

Pour en savoir plus sur l’adage infans conceptus , je vous invite à lire cet article .

Exemple n°2 – L’immeuble par destination

En droit des biens, il existe une grande distinction (une « summa divisio ») entre les meubles et les immeubles. Tous les biens sont meubles ou immeubles.

Cette distinction binaire est posée par le Code civil et repose sur un critère physique (dans l’ancien droit, la distinction reposait également sur la valeur des choses). Le meuble peut être physiquement déplacé contrairement à l’immeuble qui est fixé au sol : « Tous les biens sont meubles ou immeubles » ( C. civ., art. 516 ).

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Un immeuble par destination est un meuble par nature réputé, de manière fictive, immeuble en raison du lien qui l’unit à un immeuble par nature. C’est donc un meuble (qui pourrait être physiquement déplacé) qui va être considéré comme un immeuble. Par exemple, il peut s’agir d’un animal ou d’une bibliothèque.

Vous achetez une maison dans laquelle se trouve une magnifique bibliothèque intégrée dans les murs du salon. Si cette bibliothèque est qualifiée « d’immeuble par destination », vous deviendrez propriétaire de cette bibliothèque à la suite de la vente. Le vendeur ne pourra pas la retirer et l’emporter avec lui puisqu’elle est considérée comme un « immeuble » et non comme un « meuble ».

Dans le cas d’un immeuble par destination, la loi décide de faire « comme si » un meuble par nature était un immeuble (c’est un « mensonge » volontairement prévu par la loi). La catégorie juridique d’immeuble qui repose sur un critère physique est donc déformée pour y inclure une entité qui peut être déplacée.

C’est la raison pour laquelle la fiction juridique est qualifiée par les auteurs de « contre-vérité » ( D. Chagnollaud, Dictionnaire élémentaire du droit, 2 e éd., Dalloz, p. 91 ), de « dénégation délibérée de la réalité » ( P. Jestaz, Le droit, 11 e éd. Dalloz, 2021, p. 115 ) « d’affirmation du faux » ( P. Le Maigat, GPL 8 nov. 2022, n°36 - page 19 ), d’« altération voulue du réel », de « mensonge de la loi » ( G. Cornu (sous la direction de) et Association Henri Capitant, Vocabulaire juridique, 6ème éd., Paris, Quadrige, Presses Universitaires de France, 2004, p. 402 ), « d’artifice juridique », de « négation du vrai manifeste »… ( Y. Thomas, Les artifices de la vérité en droit commun médiéval », L’Homme, 175-176, 2005, p. 129 ).

(2) Deuxième élément : la production d’effets de droit

Le deuxième élément de la définition de la fiction juridique est la production d’effets de droit. Le recours à la fiction permet de « déduire des conséquences juridiques différentes de celles qui résulteraient de la simple constatation des faits ».

Exemple n°1 : L’adage infans conceptus

L'enfant simplement conçu est considéré comme s'il était né et bénéficiait de la personnalité juridique.

Prenons un exemple ( Civ. 2 e , 14 déc. 2017, n° 16-26.687 ). Dans cet arrêt, un père avait été victime d'un accident mortel du travail alors que son épouse était enceinte. La Cour de cassation a jugé qu'un enfant peut demander réparation du préjudice subi du fait de la mort accidentelle de son père, survenue alors qu'il était conçu et non encore né. Le fait de rattacher l’enfant à naître à la catégorie juridique de « personne » lui permet donc d’obtenir la réparation d’un préjudice, c’est-à-dire des indemnités. La fiction juridique produit des effets de droit.

Exemple n°2 : L’immeuble par destination

Cette fiction juridique a un but économique. L’immeuble par destination présente plusieurs intérêts.

D’abord, l'acquéreur d'un bien immeuble peut bénéficier du transfert de propriété de certains meubles à l’occasion d’une opération juridique en les qualifiant d'immeubles par destination. Le fait de rattacher le meuble à la catégorie juridique d’immeuble permet d’arriver à cette solution.

Vous achetez une maison dans laquelle se trouve une magnifique bibliothèque intégrée dans les murs du salon. Si cette bibliothèque est qualifiée « d’immeuble par destination », vous deviendrez propriétaire de cette bibliothèque à la suite de la vente. Le vendeur ne pourra pas la retirer et l’emporter avec lui puisqu’elle est considérée comme un « immeuble ».

Ensuite, lorsqu’un bien immeuble est hypothéqué, le créancier peut saisir les biens rattachés à l’immeuble principal s’ils sont qualifiés d’immeubles par destination.

Vous achetez une maison et, afin d’obtenir le crédit immobilier, la banque vous impose une hypothèque (il s’agit de l'affectation d'un immeuble en garantie d'une obligation sans dépossession de celui qui la constitue). Une fois la maison achetée, vous n’arrivez malheureusement plus à rembourser les mensualités du crédit. La banque (le créancier) pourra saisir la maison (soit l’immeuble), mais  également  tous les biens qualifiés d’immeubles par destination (puisque ces derniers seront liés à l’immeuble).

III. Distinction de la fiction avec les présomptions

Qu’est-ce qu’une présomption .

Une présomption consiste à tenir pour réel ce qui est vraisemblable et joue en matière de preuve. Des présomptions légales opèrent soit un renversement de la charge de la preuve, soit un déplacement de l’objet de la preuve. La loi permet, pour établir un fait inconnu, au demandeur de ne prouver qu’un fait connu.

Par exemple, l’article 312 du Code civil prévoit que l’enfant conçu ou né pendant le mariage a pour père le mari. Pour établir le lien de filiation l’enfant doit simplement prouver qu’il a été conçu ou né pendant le mariage. Il n’a pas à prouver directement le lien de paternité. On déplace l’objet de la preuve pour faciliter la preuve du lien de filiation entre l’enfant et le père.

Quelles sont les différences entre la présomption et la fiction ?

La présomption et la fiction juridique ne sont pas synonymes.

D’abord, la présomption tient pour réel ce qui est vraisemblable. Il existe une « idée de probabilité du fait présumé » ( R. Decottignies, Les présomptions en droit privé, LGDJ, 1950, p.9 ). À l’inverse, la fiction juridique constitue un véritable mensonge, une négation volontaire de la réalité. Par exemple, s’agissant de la présomption de paternité visée ci-dessus, il est vraisemblable que le mari soit le père. En revanche, s’agissant de la fiction, il est certain qu’un fœtus ne peut pas être qualifié juridiquement de « personne », contrairement à ce que prévoit l’adage infans conceptus .

Ensuite, une fiction n’admet pas de preuve contraire, contrairement aux présomptions. En effet, les présomptions simples (contrairement aux présomptions irréfragables) peuvent être combattues par la preuve contraire. Par exemple, la présomption de paternité qui pose que l’enfant a pour père le mari peut être combattue par certains éléments factuels. Le « vrai » peut être prouvé.

IV. Intérêts des fictions juridiques

Les fictions juridiques présentent plusieurs intérêts. Sans prétendre à l’exhaustivité, il est possible d’en citer quelques-uns.

D’abord, elles permettent d’adapter les normes juridiques en vigueur. Par exemple, l’adage infans conceptus permet d’adapter la règle selon laquelle le fœtus n’a pas la personnalité juridique dans certaines situations.

Ensuite, elles ont une fonction simplificatrice. Plutôt que de légiférer en créant de nouvelles catégories juridiques, la fiction permet, à partir d’une catégorie juridique existante, de résoudre des problèmes. La fiction juridique permet simplement d’étendre une catégorie juridique déjà existante plutôt que d’introduire de nouveaux concepts juridiques

Enfin, les fictions juridiques permettent dans certains cas de satisfaire un objectif d’équité.

Le fait de fixer le début de la personnalité juridique à la naissance peut conduire à des solutions injustes. Par exemple, en privant de succession un enfant né quelques jours seulement après la mort de son père. L'adage infans permet de corriger certains de ces problèmes et repose donc sur l'équité ( V. F. Zenati-Castaing et T. Revet, Manuel de droit des personnes, PUF, 2006, n° 12 ).

J’espère que vous avez apprécié ce cours sur les fictions juridiques.

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Auteur de l'article

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Fondateur du site aideauxtd.com, anciennement Avocat spécialisé en droit social à Nice et enseignant à l'Université Nice Sophia Antipolis et formateur en droit social. Master II Droit social à l’Université Paris II Panthéon Assas.

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• Date : 12/09/2018

Exemple de fiche d’arrêt rédigée

• Date : 01/05/2020

immeuble par destination dissertation juridique

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  4. Immeuble par destination : définition et exemple

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  5. Méthodologie de la dissertation juridique

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  6. Immeuble par destination : définition, conditions, exemples

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COMMENTS

  1. Les immeubles par destination : définition et distinction avec les

    Les immeubles par destination sont donc des biens que l'on peut déplacer. A contrario, les immeubles par nature sont fixes : il s'agit du sol et de tout ce qui est fixé au sol. On peut citer comme exemples d'immeubles par nature : Les constructions : les bâtiments, les ponts, les canalisations…. A noter que les matériaux qui ont servi ...

  2. Immeuble par destination : définition et exemple

    [IMMEUBLE PAR DESTINATION] L'immeuble par destination est une notion juridique permettant de ne pas séparer les éléments indissociables d'un immeuble.

  3. La destination et l'usage de l'immeuble, éléments de l'application d'un

    1Quelques mots s'imposent à titre liminaire pour envisager les termes de mon intervention.. La destination et l'usage. 2La destination d'abord, qui est au centre de nos recherches.Le terme « destination », à travers le verbe « destiner », provient du latin destinare, qui signifie « fixer par le destin ».Cette dernière expression est fondamentale, en ce qu'elle laisse entrevoir ...

  4. Les immeubles par destination

    Résumé du document. A partir de l'article 522 du Code civil. L'idée qui prévaut lorsque l'on s'intéresse aux immeubles par destination c'est de bien concevoir un bien meuble d'un côté, un bien immeuble de l'autre, ce bien meuble va avec la volonté du proprio du meuble et de l'immeuble, s'affecter, se destiner à l'exploitation de l ...

  5. De la distinction entre les meubles et les immeubles

    En tout état de cause, dès lors qu'elle adhère au sol elle est constitutive d'un immeuble par nature. 2. Les immeubles par destination. À la différence des immeubles par nature qui sont déterminés par un critère physique, les immeubles par destination reposent sur la volonté du propriétaire.

  6. Section 2

    Section 2Les immeubles par destination. 117. Catégorie des immeubles par destination. Un immeuble par destination est un meuble qui, par l'effet d'une fiction, est considéré comme un immeuble en raison de son affectation, soit intellectuelle, soit matérielle, à un véritable immeuble. Il y a là une manifestation de la force attractive de ...

  7. La destination de l'immeuble et le droit foncier

    Toutefois, il est possible de se rassurer très vite en ouvrant un Code civil. Outre l'hypothèse la plus connue de l'immobilisation par destination (C. civ., art. 524 et 525 : on pourrait parler « de destination de l'immeuble à l'envers »), ou encore des servitudes en général et celles par destination de père de famille en ...

  8. Essai sur la notion d'immobilisation par destination

    Les articles du Code civil qui désignent les biens qui désignent les immeubles par destination, permettent à la volonté de s'affranchir des limites strictement matérielles de la summa divisio. Mais pour produire des effets aussi importants que la transformation de la nature juridique d'un meuble, la volonté doit présenter une certaine stabilité qu'elle ne peut acquérir que lorsque le ...

  9. Immeuble par destination

    L'immeuble par destination vise tout meuble accessoires à l'immeuble , c'est-à-dire un bien qui, « dans la mesure où ils appartiennent à la même personne, est soit attaché ou placé à demeure, soit est mis au service de l'exploitation ou de la sauvegarde de ce bien principal » .. Code civil, art. 3.47, al.4 [2] Code civil, art. 3.9, al. 1 er

  10. Immeuble par destination : définition, conditions, exemples

    Le Code civil propose de nombreux exemples d'immeubles par destination aux articles 522 et suivants. Il peut s'agir d'animaux, d'un tracteur dans un champ, d'une statue dans une niche, de camionnettes…. • L'immeuble par nature est tout ce qui ne peut pas ni être déplacé ni se déplacer.

  11. Commentaire d'arrêt de l'Assemblée plénière du 15 Avril 1988 : la

    L'assemblée plénière a en rendant son arrêt le 15 avril 1988, estimé que les fresques, immeubles par nature, sont devenues des meubles du fait de leurs arrachements La cour fonde son arrêt sur l'art 524C.civ qui dispose que seuls sont immeubles par destination les objets mobiliers que le propriétaire d'un fonds y a placés pour le ...

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    Exemple de dissertation juridique. Publié le 26 novembre 2018 par Justine Debret. Mis à jour le 7 décembre 2020. Il est important de savoir ce que vos évaluateurs attendent de vous pour une dissertation juridique. Voici des exemples complets de dissertations juridiques que vous pouvez consulter et télécharger pour comprendre ce qui est ...

  13. 3. La réforme des sûretés et le gage d'immeuble par destination

    Cheuvreux Paris. 3. La réforme des sûretés et le gage d'immeuble par destination. 26 Nov 2021 • Veille juridique. Réforme du droit des sûretés : ce qui change au 1er janvier 2022. L'ordonnance du 15 septembre 2021 autorise le gage d'immeubles par destination. Cette innovation, consacrée par le nouvel article 2334 du Code civil ...

  14. La distinction des immeubles en droit des biens

    En droit des biens, plusieurs distinctions existent. Parmi celles-ci, l'une des plus fondamentales réside dans l'opposition entre les biens et les immeubles, précisée en ces termes par l'article 516 du Code civil : « tous les biens sont meubles ou immeubles ». Cette distinction est souvent décrite comme étant la summa divisio.

  15. Qu'est-ce qu'un immeuble? Les notions d'immeuble par nature, par

    L'article 517 du Code civil dispose que « les biens sont immeubles, ou par leur nature, ou par leur destination, ou par l'objet auquel ils s'appliquent.. Ainsi existe-t-il trois catégories d'immeubles dont il ressort, à l'analyse, que l'immeuble se caractérise par sa fixité, en ce sens qu'il ne peut pas être déplacé contrairement aux meubles qui se caractérisent par leur ...

  16. Séance 2 distinction entre meuble et immeubler

    B- Les immeubles par des4na4on. Les immeubles par destination sont des choses pourtant déplaçables, mais qualifiées d'immeubles par le Code civil en raison de leur destination, qui est d'être affectées à un immeuble par nature. Cela permet de soumettre au même régime juridique tout ce qui forme un ensemble économiquement cohérent. 3 ...

  17. Deux cas pratiques en droit civil

    Le couple a voulu attacher le bien meuble au bâtiment en installant une des niches pour les accueillir. L'alinéa 4 de l'article 525 du code civil, précise que si les niches ont été construites spécialement pour recevoir ces statues alors les statues sont immeubles par destination, attachées au fond à perpétuelle demeure.

  18. TD 01 Qualification et classification des biens (imprimer)

    L'article 517 indique les immeubles sont par nature, par destination ou à perpétuelle demeure définition de chaque immeuble. Les meubles par nature sont caractérisés par leur mobilité. Il existe les meubles par anticipation, c'est-à-dire des biens qui ont une valeur immobilière mais qui seront considéré comme meuble à raison de ...

  19. PDF Fiche n°2 : La classification des biens

    A l'inverse, c'est un immeuble par destination si son détachement reste concevable. Les immeu les par l'o jet auquel ils s'appliquent : Ce sont exclusivement des biens incorporels. Il s'agit des droits portants sur des immeubles. Exemples : • Un droit d'usufruit sur un immeuble est lui-même un immeuble.

  20. Fiction juridique : définition et exemples

    Exemple n°2 - L'immeuble par destination. En droit des biens, il existe une grande distinction (une « summa divisio ») entre les meubles et les immeubles. Tous les biens sont meubles ou immeubles. ... Plan de la dissertation juridique : méthode et exemples • Date : 10/11/2021 • Auteur : Raphaël BRIGUET-LAMARRE.

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    1. That their united action, pledged for the prosecution of the war against their respective enemies, will be continued for the organization and maintenance of peace and security. 2. That those of them at war with a common enemy will act together in all matters relating to the surrender and disarmament of that enemy. 3.